Jean-Paul BADER ("JP")
une figure emblématique de la Résistance et du scoutisme juif
1923 - 2012
Jean Daltroff


Jean-Paul Bader résistant (1943-1944).. Coll. Sonia Lemmel
Jean-Paul Bader, une grande figure de la Résistance, du scoutisme et de l'éducation juive, nous a quittés le 5 mars 2012.

De l'union d'Emile Bader originaire de Dambach-la-Ville et de Jeanne Bauer de Strasbourg devaient naître deux enfants, Jean-Paul et Sonia. Émile et Jeanne tiendront un commerce de bonneterie et de mercerie successivement à Sélestat et à Strasbourg, Grand'Rue jusqu'en 1937.

Sa jeunesse à Strasbourg puis à Paris

Né le 19 mai 1923 à Strasbourg, Jean-Paul Bader vécut son enfance à Sélestat puis à Strasbourg de 1929 à 1938. Il fit ses premiers pas scolaires à l'Ecole publique suivant des cours au lycée Kléber à partir des classes élémentaires jusqu'à la troisième.

De parents pratiquants, Jean-Paul fréquenta très tôt la synagogue et le Talmud Torah. Il participa aux activités des jeunes dans la grande synagogue du quai Kléber de Strasbourg entre 1934 et 1937. Il relatait dans une correspondance que deux salles servaient à l'organisation d'activités destinées aux jeunes (1) :
- Abraham Deutsch, rabbin de Bischheim et directeur du Talmud Torah organisait le jeudi matin avant le début des cours un office du matin pour les jeunes pré-barmitsva, dans le petit oratoire de la grande synagogue qui se trouvait dans le parvis côté Nord donnant sur la rue du Marais Vert.
- En 1936, Léo Cohn fut nommé animateur de la jeunesse. Il organisa aussitôt un office de jeunes le vendredi soir et le samedi matin dans le même oratoire en attendant que soit aménagé le Merkaz Hanoar, le nouveau Centre des Jeunes inauguré le 18 mai 1938 au 29, rue Oberlin à Strasbourg fréquenté par plusieurs mouvements de jeunesse.

Il y avait notamment les Eclaireurs Israélites de France, mouvement très structuré qui existait à Strasbourg depuis l'automne 1928. Le principal maître à penser à cette époque était Frédéric Hammel ("Chameau") avec les troupes Cerf Berr et Herzl et une équipe d'éclaireuses aînées, le Feu. L'association Yechouroun qui avait été fondée en 1926 par quelques jeunes garçons de la communauté Ets Hayim de Strasbourg et qui n'avait cessé de se développer comprenait en 1938, selon Paul Klein, "huit groupes de garçons et de jeunes filles". Il y avait encore le mouvement Torah wehavodah animé de l'idée religieuse et sioniste, Hatikvah, mouvement de jeunesse sioniste désirant prendre un chemin librement choisi et qui était formé de pionniers idéalistes et L'Association sportive israélite de Strasbourg qui pensait qu'une formation physique de l'adolescent méritait la même sollicitude que la formation intellectuelle. Enfin le rabbin Deutsch, rabbin de la jeunesse avait créé en 1934-1935 un groupe de jeunes, sous le nom de Jeunesse Juive de Strasbourg (J.J.S.T.). Elle était l'héritière spirituelle de l'association Emounah d'où étaient sortis les dirigeants de différents mouvements strasbourgeois. Au sein même de cette association, un mouvement de jeunes fut fondé pour s'informer et approfondir les valeurs permanentes du judaïsme. Ce groupe dont faisait partie Jean-Paul Bader, comptait une vingtaine de jeunes filles et de jeunes garçons. Les réunions hebdomadaires, les cercles d'études, les exposés, les séances de jeux se tenaient dans la salle du Consistoire israélite du Bas-Rhin, située au premier étage sur la façade Ouest, à droite de la rosace avant de se dérouler rue Oberlin à Strasbourg.

En 1938, Jean-Paul Bader entra à l'Ecole Maïmonide, premier établissement secondaire juif de France fondé à Boulogne-Billancourt en 1935 dirigé par Marcus Cohn. Le grand rabbin Liber, directeur de l'école rabbinique de France, écrivait dans l'Univers Israélite, le 7 juin 1935, que le nom de Maïmonide avait été choisi parce "qu'il symbolisait l'union de la culture juive et de la culture générale qui devait sauver le judaïsme moderne". C'était pour le grand rabbin Liber, à la fois une bonne nouvelle et une vision d'espoir pour une renaissance de la culture juive. Pour le jeune Jean-Paul, ce choix n'était pas anodin. Il voulait en effet devenir ministre officiant, selon sa sœur Sonia, et il approfondit durant un an et demi ses connaissances générales et religieuses tout en participant à la vie de la communauté juive (2).

Entre études et résistance

De Périgueux à Limoges

La ville de Strasbourg fut évacuée dès les premiers jours du conflit en septembre 1939. La famille Bader prit le chemin de l'exode en compagnie de nombreux Strasbourgeois. C'est ainsi qu'elle se rendit d'abord à Provenchères et à Saint-Dié-des-Vosges en train puis à Dijon. Le père de Jean-Paul, Émile malade (invalide de guerre ayant contracté la grippe espagnole durant la première guerre mondiale) fut hospitalisé durant trois jours à Dijon. La famille s'installa en Dordogne à Périgueux en collocation pour que les enfants continuent leurs études. De nombreux Juifs alsaciens y trouvèrent également refuge et très vite Liliane Marx, la responsable du groupe E.I. prit contact avec Jean-Paul Bader. Dans un premier temps, elle lui demanda de l'aider dans l'accueil des nouveaux réfugiés. Pendant qu'ils attendaient les trains, elle lui expliqua ce qu'étaient les E.I., leurs valeurs et leur mode de vie. C'est ainsi qu'en septembre 1940, Jean-Paul devint chef E.I. Il eut notamment pour mission de créer et d'encadrer la nouvelle troupe. Les jeunes évacués pouvaient donc retrouver les activités qu'ils pratiquaient avant le début de la guerre, ainsi qu'une ambiance juive en pleine période de tourmente pour leurs coreligionnaires de la Zone Occupée.

Jean-Paul Bader en 1940. Coll. Sonia Lemmel
Pour l'aider dans sa tâche, Jean-Paul reçut notamment les visites régulières d'André Cahen "Cigogne" qui fit partie de la première patrouille E.I. en 1923. Directeur de société, longtemps actif au sein des E.I., André Cahen s'était aussi occupé de l'Amicale des anciens scouts. Généralement ils laissaient au passage des papiers ronéotypés qui servaient de plan pour les activités (jeux, noeuds, judaïsme), et communiquaient les dernières nouvelles et directives.

Il participa aussi à des camps de formation pour les nouveaux cadres. Ainsi près de Moissac fut organisé le camp de Montserval VII. Bien que n'ayant plus lieu, comme avant la guerre, dans la ville de Chapelle-en-Serval (Oise), les chefs E.I. décidèrent de garder le nom en souvenir de cette époque. Durant ce camp, Jean-Paul développa ses connaissances en matière de scoutisme (vie en patrouille, constructions), pédagogie, psychologie mais aussi de judaïsme et notamment d'histoire juive.

Jean-Paul investit beaucoup de son temps libre dans le mouvement E.I. et prit dès l'année 1941 la direction du groupe de Périgueux en remplacement de Liliane Marx, partie au chantier rural de Lautrec. Mais Jean-Paul n'avait rien perdu de sa volonté d'étudier toujours plus la Torah et les autres livres du judaïsme. Sa soif de connaissance fut épanchée au Petit Séminaire Israélite de Limoges, créé par le rabbin Deutsch, où il passa toutes les journées non occupées par les activités EI.

À Limoges, le rabbin Abraham Deutsch regroupa presque immédiatement après l'évacuation de Strasbourg, ses élèves prêts à faire des études religieuses approfondies. Le Petit Séminaire Israélite de Limoges (P.S.I.L.) vit le jour. Dans l'esprit du rabbin Deutsch, cette institution formerait les chefs des communautés que nécessitait la nouvelle situation. Jean-Paul connaissait déjà le rabbin Deutsch depuis longtemps et rejoignit donc avec beaucoup de joie son ancien maître dans sa "mini-yechiva" à la fin de l'année 1941. Les cours eurent lieu dans un premier temps dans des salles louées par le P.S.I.L. puis, faute de moyens, dans les bureaux du rabbin. Jean-Paul et d'autres élèves - dont notamment Théo Dreyfuss, Max Warschawski et Lucien Lazare étudièrent ainsi la guemara et la michna. Mais les cours dispensés par le P.S.I.L. ne furent pas uniquement religieux. C'est dans ce cadre que Jean-Paul obtint la seconde partie de son baccalauréat après avoir obtenu la première à Périgueux.

Pendant ce temps, la situation en France évolua vite et de plus en plus de Juifs durent se cacher pour éviter les rafles, surtout avec l'invasion de la "Zone Libre" par les Allemands le 11 novembre 1942. Les E.I. commencèrent donc à développer un réseau d'entre aide dans lequel Jean-Paul entra progressivement.

Vers la clandestinité

À Périgueux, Jean-Paul se contenta d'organiser des activités scoutes. C'est en fait à Limoges où se trouvait une "antenne" de l'œuvre de Secours aux Enfants (O.S.E.) qu'il fut contacté par des membres régionaux de la "Sixième". Ils lui demandèrent d'organiser une fausse colonie afin d'emmener un groupe d'enfants de Limoges à Lyon. Arrivé dans la capitale des Gaules, Jean-Paul Bader confia les enfants à d'autres "assistantes sociales" qui furent chargées de faire passer les enfants en Suisse. Il effectua cette mission en binôme, comme cela se faisait le plus souvent, avec Marinette Kaufman. Les dirigeants de la "Sixième" considéraient qu'un animateur et une animatrice passaient plus inaperçus quand ils s'occupaient d'enfants des deux sexes.

Mais le convoyage d'enfants vers Lyon ne constitua rapidement plus son seul domaine d'action. La situation des Juifs s'aggrava un peu plus chaque jour. Ils furent obligés de se cacher et eurent besoin pour circuler et se nourrir de fausses cartes d'identité et de tickets d'alimentation. Jean-Paul reçut donc l'ordre d'en fabriquer ou de trouver un moyen de les échanger.

Jean-Paul s'investit beaucoup dans ses actions de résistant sans se poser de questions. Il obéit aux ordres de ses chefs scouts sans se soucier, ou peut-être même sans se rendre vraiment compte, du danger qu'il courait.

Jean-Paul continua à suivre les cours du rabbin Deutsch au P.S.I.L. Il s'y rendit même tous les jours jusqu'à l'arrestation de son maître en plein cours et en présence de Jean-Paul, pendant l'hiver 1942-1943.

Jean-Paul parvint, lui-même, par deux fois à échapper aux rafles. La veille d'une grande rafle à Périgueux, un ami E.I. de Jean-Paul surprit une réunion de la Gestapo dans le bar où il travaillait. Celle-ci concernait la rafle en question ; il en entendit la date et prévint Jean-Paul qui put quitter la ville avec ses parents. Une autre fois, les Allemands vinrent directement chez la famille Bader pour les arrêter. Heureusement ceux-ci avaient déménagé peu auparavant (ils habitaient juste en face de la caserne allemande). Prévenus par leur ancien propriétaire, ils eurent le temps de quitter lors nouvel appartement et évitèrent ainsi la rafle.

Jean-Paul ne fut pas le seul à courir de grands risques et il le savait. Il continua d'ailleurs ses missions de convoyages d'enfants vers les zones frontalières. Il reçut aussi l'ordre d'organiser un camp E.I. (sous-couvert des Éclaireurs Unionistes), comme cela était souvent le cas. Ce camp était en fait le meilleur moyen de cacher des enfants réfugiés dans des écoles et des pensionnats pendant les vacances scolaires. Il participa encore à un camp, qui eut lieu à Oradour-sur-Glane en juillet 1943 lors duquel il fut totémisé "Caméléon".

Mais avec la formation du maquis E.I., Jean-Paul ne convoya plus des enfants mais des adultes qui partirent grossir les rangs de la Compagnie Marc Haguenau.

La résistance armée

La formation du maquis E.I.

Un groupe de huit personnes créa en décembre 1943 le maquis des E.I. Celui-ci dut s'étoffer afin de devenir une force armée digne de ce nom. La direction des E.I. demanda donc à certaines personnes spécialisées dans le convoyage de jeunes vers la frontière de s'occuper dorénavant des futures recrues du maquis. C'est la mission que reçut Jean-Paul. Il fut chargé d'emmener au maquis les plus âgés et les plus fort des membres des fermes E.I.

Le trajet qu'il effectua à plusieurs reprises et toujours en binôme avec Marinette Kaufman fut synonyme de très grand danger car il leur fallait changer souvent de train ce qui était délicat pour un groupe d'une dizaine de personnes. Le risque d'être remarqué et arrêté était en effet beaucoup plus important que pour un couple, par exemple. Jean-Paul ne fut vraiment rassuré qu'à la sortie de Castres, la population des environs étant favorable au maquis. Ainsi, dans le petit train reliant la préfecture du Tarn à Vabres, Jean-Paul confia tous les papiers compromettants qu'il possédait au conducteur, afin de ne courir aucun risque en cas de contrôle allemand.

Jean-Paul ne resta jamais très longtemps au maquis car il dut sans cesse y convoyer de nouvelles personnes. Il retourna donc à Limoges où il vécut à l'hôtel car il était devenu trop dangereux pour lui de rester dans l'appartement qu'il occupait avec ses parents. Néanmoins l'hôtel ne lui procurait pas une sécurité absolue, les contrôles d'identité y étant fréquents. Il en subit d'ailleurs un qui faillit mal se terminer, lorsqu'un soldat allemand observa sa carte d'identité (sans tampon "juif") au nom de Bader. Jean-Paul, en faisant semblant de parler un allemand moyen, lui expliqua qu'il était Alsacien et qu'il faisait des études de droit à Limoges. Le soldat fouilla malgré cela la chambre y découvrit des livres de prières, et demanda à Jean-Paul en quelle langue ils étaient. "Arabisch (arabe)" répondit-il, ce qui mit fin à un contrôle assez peu minutieux ; le soldat allemand n'ayant remarqué ni les fausses cartes d'identité cachées derrière le miroir, ni les pistolets accrochés aux battants des volets.

En 1944, il s'engagea dans les F.F.I. (Forces françaises de l'intérieur).
Jean-Paul poursuivit sa mission de "passeur" de nouveaux éléments vers la Compagnie Marc Haguenau (3). Il effectua son dernier convoi en juin 1944 avant de recevoir, suite au débarquement de Normandie, l'ordre de rejoindre lui-même le maquis. Ce dernier convoi se passa bien jusqu'à l'arrivée dans le Tarn où des combats eurent lieu et où la Résistance fit sauter de nombreuses voies de chemin de fer. Obligé de faire du "stop", le groupe fut arrêté par des soldats allemands car cela était interdit. Jean-Paul se débarrassa discrètement de tous les papiers qui les trahissaient avant d'arriver à la Kommandantur où n'ayant rien de grave à leur reprocher, les Allemands les relâchèrent. Les jeunes maquisards rejoignirent donc leur cantonnement : Lacado, commandé par Adrien Gensburger pour les religieux, et Laroquecommandé par Roger Cahen, pour les moins religieux.

Jean-Paul ne rejoignit finalement le maquis qu'au début du mois d'août 1944. Il effectua une dernière fois le long trajet entre Limoges et Vabres où il arriva le 8 août au petit matin, juste après l'attaque du cantonnement de Laroque. "Plus bas à la station du petit train en provenance de Castres, Jean-Paul Bader, Liliane Marx et quelques autres n'eurent la vie sauve que grâce à leur présence d'esprit : ils se métamorphosèrent en serveuses et plongeurs au moment où, de retour de leur opération, les soldats allemands arrivèrent dans un café-restaurant où eux-mêmes s'étaient arrêtés".

Jean-Paul devint donc maquisard et participa à toutes les actions de la Compagnie Marc Haguenau, dont il devint l'aumônier, notamment l'attaque du train de Mazamet et la libération de Castres. Il s'engagea ensuite, comme son sous-lieutenant Adrien Gensburger, dans le régiment de cavalerie formé par le commandant Dunoyer de Segonzac, participa activement à ses victoires et rejoignit à Dijon la Première armée française de Lattre de Tassigny.

L'aumônier juif de la Première armée

Dunoyer de Segonzac proposa à Jean-Paul de devenir l'aumônier juif pour la Première armée. Jean-Paul accepta et organisa des offices dès que la situation militaire le permit.

Les combats furent durs et lourds en perte, notamment pour les E.I. Néanmoins l'unité de Jean-Paul (commandée par Adrien) arriva sur les bords du Rhin à l'approche du printemps. Elle y obtint une permission pour la fête de Pessah fêtée dans la ville toute proche de Belfort, déjà libérée. Fin avril, le Rhin fut enfin franchi et quelques jours plus tard, le 8 mai, toute la Première armée française fêta l'armistice sur les bords du lac de Constance.

Jean-Paul Bader au milieu des déportés à Constance en 1945. Coll. Sonia Lemmel

Jean-Paul reçut l'ordre de s'occuper des nombreux juifs déportés de retour à Constance. Il dut leur trouver un logement, les aider pour toutes leurs démarches et surtout les soutenir après les années d'enfer qu'ils avaient pour la plupart vécues dans les camps de la mort. Il participa aussi à l'organisation de convois pour leur départ en Palestine. Jean-Paul devint très vite l'un des aumôniers juifs officiels de toute la zone Sud de l'Allemagne. Mais l'aide à la population juive locale était tellement importante qu'elle était loin d'être acheveé lorsque Jean-Paul fut démobilisé et qu'il rentra à Paris à la fin de l'année 1946.

En 1948, il épousa Paulette Veit qui sera à ses côtés et l'épaulera tout au long de son parcours E.I. De cette union naîtront quatre enfants : Jean-Jacques, Martine, Patrick et Philippe. Instituteur, il devint ensuite professeur d'allemand notamment au lycée de Fontenay.

Le parcours scout

Jean-Paul Bader, le 14 septembre 1945 avant Kippour
5706. Coll. Sonia Lemmel
"JP" se consacra au mouvement et entama un long parcours de responsabilités tant sur le plan de l'animation que de la formation.
"JP" (totémisé Caméléon contemplatif) exerça différentes responsabilités au sein du mouvement des E.E.I.F., notamment comme D.C.C., commissaire international et commissaire général.

En effet, Jean-Paul élève de l'Ecole rabbinique la quitta pour entrer au Q.G. des E.I. comme permanent en 1949, mouvement au sein duquel il resta actif toute sa vie. En 1949, il fut nommé commissaire du groupe E.I. des Tournelles (Paris 4e). En 1950, il devint permanent au Centre national au Service animation et publications. En 1951, il participa au camp de formation de formateurs de Gilwell Park où il obtint son diplôme de Deputy Camp Chief (DCC) symbolisé par les quatre tisons. Des générations de chefs E.I. seront formées par "JP" et recevront leurs deux tisons à l'issue de la formation "Cappy E.I.F".

En été 1952, il organisa et dirigea le premier voyage de chefs en Israël.
Commissaire local d'un groupe rue des Tournelles à Paris, il en créa un autre, en 1955, rue de la Victoire à Paris (9e). La même année, il fut nommé commissaire national à la formation, fonction qu'il assumera pendant plus de trente années. Nombreux furent les chefs E.I. qui profitèrent et bénéficièrent de ses compétences, ses connaissances et de son expérience du terrain.
En 1957, il prit la direction du Groupe Local Samuel (Paris 9e).
En 1965, il devint commissaire international des E.I.F. Il occupera cette fonction pendant sept années, ce qui lui donnera l'occasion de représenter les E.I. aux jamborees du Canada, du Japon et des USA ainsi qu'à quatre conférences mondiales du scoutisme.
En 1966, il fut nommé commissaire national éclaireurs. Entre les années 1960 et 1970 il dirigea avec Paulette, son épouse de nombreux camps louveteaux.
En 1974, "JP" fut appelé pour assumer la fonction de commissaire général d'un mouvement alors en pleine crise."JP" fut pendant de longues années administrateur des E.I. et représenta le mouvement dans différentes instances de la fédération du scoutisme français (conseil national, commission formation).

Durant toutes ces années, Jean-Paul n'eut de cesse de raconter aux jeunes E.I. les actions menées par les anciens pendant la période de l'occupation sans jamais en tirer un quelconque profit personnel ni même vanter quelques qualités particulières des E.I. mais tout simplement en insistant sur le fait que c'était leur devoir de Juif et de scout.

Il fut également durant de nombreuses années directeur du Talmud Torah à la synagogue de la rue de la Victoire, et directeur des colonies de l'O.S.E. (Œuvre de Secours aux Enfants), en particulier avec son épouse Paulette à Luttenbach-près-Munster dans le Haut-Rhin.

Discret, souriant, d'une énergie débordante, d'un remarquable altruisme, - sa sœur Sonia Lemmel nous a confié qu' "on avait l'impression qu'il avait fait un vœu et qu'il ne s'arrêtait jamais" -, il fait partie de cette génération de grands éducateurs juifs qui ont vu passer entre leurs mains bienveillantes des milliers de jeunes qu'il a marqués pour le reste de leur vie (4).

Conclusion

En guise de conclusion, nous évoquerons les hommages de Béatrice Halpern Boukris et du grand rabbin René Sirat en l'honneur Jean-Paul Bader.

La premièree, du groupe E.E.I.F. de Buffault Janusz Korczak de Paris a rendu un hommage appuyé à Jean-Paul Bader le 7 mars 2012.
Elle souligne que :

"C'est tout un film qui se déroule devant nos yeux, des images qui apparaissent, tant d'images, de souvenirs qui refont surface et que l'on a brusquement envie de sous-titrer, de commenter, raconter tout ce que l'on a vécu, appris, donné, ressenti, reçu et partagé durant des décennies aux côtés de Jean-Paul à Luttenbach, Morgins, La Bernerie, les camps de Form et naturellement le groupe local de La Victoire".
Elle ajoute que tous les louveteaux et les bâtisseurs (selon l'époque) ont dû se dire qu'il était grand le Monsieur la première fois qu'ils sont venus s'inscrire le matin au Talmud Torah et l'après midi au groupe local de la Victoire dont "JP" s'est occupé jusqu'à ce que, malheureusement ses forces le lâchent.
"Oui il était grand, c'était même un géant. Géant dans son esprit, géant dans ses chansons, géant dans son humour, géant jusque dans sa provocation et si immense était son désir d'enseigner, de nous faire comprendre, de nous faire toucher du doigt la réalité, sa réalité, à travers toutes les questions qu'il savait si bien nous poser. Grand et pourtant si humble quand il nous racontait sa vie, son expérience pendant la deuxième guerre mondiale, toutes ses histoires qui avaient toujours un lien avec le judaïsme alsacien, son patois, et naturellement avec les E.I. Il racontait, il nous racontait et il le faisait vraiment bien, c'était sa manière à lui de nous éduquer :
Bon d'accord il montait les tentes aussi très bien !
Jean-Paul, les mains dans les poches, adossé à un mur ou à un arbre, il aimait regarder vivre tous ses E.I. qu'il considérait tous comme ses enfants spirituels et pour qui il a sacrifié beaucoup de choses.
Mais était-ce un sacrifice pour lui ? je ne le pense pas, car tout ce que faisait Jean-Paul c'est parce qu'il le voulait et même quand il aurait dû se reposer, Paulette et Martine n'ont jamais réussi à lui imposer quoique ce soit.
Il était comme ça, c'était son essence de vie, un lien imprescriptible avec une communauté, Nous étions les branches d'un arbre bientôt centenaire dont il a été si longtemps la sève. Les E.I. étaient tout pour lui, Robert Gamzon est le fondateur des Eclaireurs Israélites de France, toi Jean-Paul, tu es à nos yeux leur père" (5).

Le grand rabbin Sirat, quant à lui, a honoré sa mémoire le 4 avril 2012 à Jérusalem (6). Il a qualifié Jean-Paul Bader

"d'homme tout à fait remarquable qui a fait partie pendant la guerre de la résistance juive. Il a été ensuite celui qui a permis aux Juifs de France de ne pas désespérer. Il a été aumônier chef des soldats juifs en Allemagne et leur a apporté beaucoup d'aide".

Il ajoute :
"qu'il a continué tout au long de sa vie à enseigner le judaïsme, à le faire aimer et à en montrer le visage ouvert. Il a ramené vers la communauté de très nombreux jeunes de toutes les générations de la libération comme de la génération qui a suivi la guerre. Ce qui le caractérise, c'est qu'il avait le visage ouvert, rayonnant, fraternel. Il a représenté l'esprit E.I. fait d'amitié, d'ouverture, d'être toujours présent et à la disposition des uns et des autres. Pendant soixante ans, il a été responsable des E.I. la Victoire, exercé des responsabilités nationales toujours avec un sourire bienveillant, réussissant tout au long de sa vie un parcours, grâce aussi à Paulette, son épouse bienveillante toujours auprès de lui".

Chevalier dans l'ordre national du mérite du 7 juillet 1989, prix Edmond Tenoudji en 1989, il fut Officier dans l'ordre dans l'ordre des palmes académiques. Il reçut le Lion de Bronze en 2005 pour son engagement au service des E.E.I.F.

Voir aussi l'article :
Du scoutisme à la
Résistance, un
même engagement

(ch. 4)

Bibliographie :

Notes :

  1. Correspondance entre Jean-Paul Bader et Jean Daltroff du 12 avril 1996.    Retour au texte.
  2. Entrevue à Strasbourg avec Sonia Lemmel , le  mardi 24 avril 2012.    Retour au texte.
  3. La Compagnie "Marc Haguenau" est le nom donné par Robert Gamzon à l’ensemble des maquis E.I.F. du Tarn en juin 1944.    Retour au texte.
  4. Entrevue à Strasbourg avec Sonia Lemmel, le 24 avril 2012 et Israël Infos, Gérard Fredj,"décès de Jean-Paul Bader le 5 mars 2012", 8 mars 2012.    Retour au texte.
  5. Béatrice Halpern Boukris, "Hommage à Jean-Paul Bader 1923-2012", 7 mars 2012, site des EEIF Buffault Janusz Korczak Paris 75009. Elle a été E.I. à la Victoire. Elle a été présidente des E.I. de 2008 à 2011. Ses enfants sont scouts à la synagogue de la rue Buffault.
  6. Grand Rabbin René Sirat, vidéo sur You Tube "Pour honorer la mémoire de JP", Jérusalem, mercredi 4 avril 2012 à l’initiative de l’Association des Anciens E.I. en Israël.

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