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Quatre questions à Georges BLOCH

Georges  BLOCH

Georges Bloch za"l

Par son engagement au sein du Bnai Brith Europe dont il fut le Président, et VicePrésident de l'International Council of the Bnai Brith, mais aussi comme Président de la Licra, de l'Anti Diffamation Leage Mondiale, c'est un travailleur infatigable pour la cause du judaïsme que nous accompagnons ce matin.
C'est aussi un homme de paix. Il a été sans doute le défenseur le plus éloquent de l'idéal humanitaire social et spirituel, qu'on ait connu ici, en tout cas le premier défenseur européen parmi nous, des droits de l'Homme ! Et s'il a été vaincu par la maladie, sa disparition brutale ne fait, comme en témoignera dans un instant, le message du Grand Rabbin du Danemark, que resserrer les liens d'estime et de reconnaissance qui nous ont toujours unis à sa personne et à vous. Vous, chère Madame Claude Bloch qui avez accompagné ses combats, pendant 50 ans de vie commune, entourée de vos chers enfants Corinne et Thierry Brunschwig, Danièle et le Dr Jean-Gérard Bloch. De son beau-frère Jean-Pierre et Maryse Lévy et de vos petits-enfants, pour lesquels vous m'en avez fait témoignage, il avait su donner le meilleur de lui-même, à travers une présence, un amour, et une sollicitude que l'engagement n'estompait pas. Cela vous l'avez vécu en particulier lors des soirées pascales, où il avait l'art d'actualiser sa propre sortie d'Egypte et vous la faire partager ! Mais Monsieur Georges Marcel Bloch, G.M. Bloch comme on l'a même appelé, avec quelque familiarité, a aimé beaucoup de choses, et il suffit, d'un coup d'oeil sur les livres et les oeuvres d'art qui l'entouraient pour comprendre que, sans faire de différence entre les hommes, il avait aimé l'humanité entière, qu'il s'était donné pour mission, au sein des nombreuses associations qu'il dirigeait, d'élever moralement ! Il n'a vraiment haï qu'une seule chose sur terre, parce qu'elle lui semblait la négation de la raison : l'intolérance.
Georges Bloch voyait dans l'intolérance, le mal héréditaire de notre société. Et lui, qui s'était pourtant battu dans l'Armée américaine à Alger, qui avait traversé les temps d'épreuve, la Shoah, mais aussi, connu de près, par les relations qu'il avait nouées entre l'Est et l'Ouest, la guerre froide, et engagé dans le combat pour les Prisonniers de Sion, avait la conviction qu'il serait possible de mettre fin aux conflits qui divisent les hommes et les peuples, sans violence par des concessions mutuelles parce qu'ils relèvent, tous, du domaine de l'humain.
Il était persuadé que presque tous les différends pourraient se régler par voie transactionnelle. C'était, en particulier, son avis sur le conflit israélo-arabe. Si la terreur ou l'incompréhension réciproque ne venaient pas constamment jeter de l'huile sur le feu. De là, je suppose, ce visage toujours serein, souriant et parfois énigmatique qui révélait une nature communicative dans un monde où il se sentait responsable en qualité de Sage, et ardent citoyen comme en témoignent aussi ses pairs du Bnai Brith européen et international.
Apaiser les conflits par une bienveillante compréhension, éclairer ce qui est trouble, démêler ce qui est embrouillé, raccommoder ce qui est déchiré, rapprocher l'individu de la communauté, c'était là, l'art délicat qui fit la force de celui qui rayonna également au sein de la Commission Administrative, comme au Conseil d'Administration de la Clinique Adassa près de 40 ans et qui parmi nombre de projets communautaires voulut créer une communauté juive libérale et soutint aussi la création de l'office hébreu-français. En fait, y a-t-il eu une sphère qui ne fut accessible ni même familière à son talent de médiateur ? Lui qui fit fraterniser tant de chrétiens avec les représentants du judaïsme européen. Si j'osais, je dirai, que pour ce petit-fils du Rabbin de Saverne, le Rabbin Armand Bloch dont il était très proche et dont il se considérait comme le fils spirituel dans le souvenir de son grand oncle, le Grand Rabbin Abraham Bloch, entré dans la légende sur les tranchées, si j'osais, je dirai de cet élève brillant du Grand Rabbin Abraham Deutsch et ce disciple de Léo Baeck, que l'ouverture du judaïsme à l'humanité était pour lui un autre moyen de chercher Dieu tout aussi naturel que la théologie. Le fil rouge d'une telle existence ? Pour ma part je le vois dans son nom ! C'est d'ailleurs la première chose, n'est-ce pas, que vous m'avez confié. Yossef David Ben Naphtali, ce même Joseph que Jacob envoie pour rejoindre ses frères à Sichem : "Et Israël dit à Joseph, va donc voir la paix de tes frères et la paix du troupeau et ramène-moi une parole". (...)

René GUTMAN
Grand Rabbin de Strasbourg et du Bas-Rhin

Georges M. Bloch za"l est l'un des fondateurs de la première Loge B'nai B'rith à Strasbourg. Aujourd'hui, devenu une éminence grise de l'organisation mondiale, il représente à beaucoup d'égards la mémoire de cette association. Nous avons souhaité l'interroger sur son cheminement au fil du temps au sein d'une organisation qui se développait sur le continent européen.

Quelles ont été les démarches du BB après la seconde guerre mondiale ?

Dans les années 1947-48, le B'nai B'rith américain cherchait à favoriser la renaissance des communautés juives disparues durant la guerre en Europe. Aussi, a-il voulu créer des Loges B'nai B'rith qui pouvaient faciliter la reconstitution de communautés. Saul Joftes, américain, fut spécialement chargé de cette mission en France. Ainsi, fut fondée en 1948 à Strasbourg la loge Alsace présidée par le Docteur Revel entouré d'une trentaine de membres, tous appartenant au cercle des dirigeants de la communauté juive. A l'occasion de la cérémonie de création, je fus appelé de Zurich où j'étudiais, afin d'exercer le rôle d' "interprète" de M. Joftes. Je fus également intronisé en tant que membre fondateur malgré mon jeune âge. Une dérogation avait été nécessaire car je n'avais pas l'âge de 30 ans, minimum requis à l'époque. M.Joftes m'a ensuite proposé de l'accompagner dans l'exercice de sa mission et de développer un réseau B'nai B'rith en Europe. Plus tard, ce dernier est retourné aux Etats Unis et m'a confié la poursuite de cette tâche. L'Union des loges d'Europe fut constituée en 1949-50, réunissant les loges de Grande- Bretagne, France, Belgique, Pays-Bas, Suisse et Danemark., rejoints par la suite par l'Italie, l'Allemagne et le Luxembourg, où de nouvelles loges furent ouvertes. Dans les années 70, l'organisation voulut ouvrir une branche pour la jeunesse en Europe et elle créa une section européenne du BBYO , B'nai B'rith Youth Organisation, représentée ici même à Strasbourg depuis plus de dix ans.

Et quel a été votre parcours à partir de là ?

Je fus nommé secrétaire général auprès du grand rabbin, Président Léo Baeck, ancien déporté, président de la communauté juive d'Allemagne jusqu'à la guerre. En 1965, je suis entré au sein de l'Exécutif européen et en fut président de 1968 à 1977. J'ai alors rejoint les instances du B'nai B'rith international en tant que membre du Conseil international dont je fus vice-président, puis président en 1986. Aujourd'hui je suis encore conseiller spécial du président Heidemann et membre du Comité exécutif international.

Comment définissez-vous cette organisation ?

Il s'agit d'un réseau mondial d'associations qui collaborent sur le principe de la subsidiarité tel qu'il est pratiqué dans l'Union européenne par exemple. La loge a pour interlocuteur les pouvoirs publics locaux et régionaux, le BBF les instances nationales françaises et le BB Europe, les instances européennes. Le système est pyramidal et fonctionne sur un mode très démocratique d'élections de responsables pour des mandats courts de deux ans renouvelables une seule fois : une façon de permettre au plus grand nombre d'exercer des responsabilités associatives et aussi d'éviter la sclérose de la structure. J'ajouterais que l'action du B'nai B'rith repose sur le socle des valeurs fondamentales énoncées dans la Charte du B'nai B'rith évoquée dans l'historique de l'organisation.

Parmi les actions BB les plus significatives, pouvez vous citer celles qui vous ont particulièrement touché ?

Après le conflit mondial , les actions ADL (Anti Diffamation League) ont été particulièrement importantes ; elles représentaient une forme de réponse et de défense vis à vis du drame de la Shoah. Je citerais tout particulièrement Jean Pierre-Bloch très grand résistant, qui présida aux destinées de l'ADL au sein de la loge France, puis devint président de la LICRA. L'ADL a été un facteur de notoriété considérable au sein des communautés juives et dans la société européenne plus généralement.
Parmi les actions, je pense en particulier aux opérations de rapprochement des Juifs et du Vatican, l'organisation de la visite de Jules Isaac au Pape Jean XXIII, l'affaire du Carmel d'Auschwitz, aux relations avec le Chancelier autrichien Kreisky afin de permettre aux Juifs émigrés de l'ex URSS de transiter en Autriche avant de gagner les USA ou Israël, la rédaction d'un Livre Blanc sur les juifs dans les goulags et les manifestations devant les ambassades d'URSS, la rédaction en 14 langues d'une plaquette sur les Droits de l'Homme, destinée aux pays émergents européens, réalisée avec le concours du Conseil de l'Europe.
D'autres actions me paraissent également remarquables, car elles sont fondées sur le mot "ouverture" : Loges ouvertes aux hommes et aux femmes, ce qui n'était pas le cas aux Etats unis où se côtoyaient des loges féminines et masculines, ouverture aux jeunes afin qu'ils s'imprègnent des valeurs du B'nai B'rith et qu'ils prennent conscience de l'engagement citoyen.

propos recueillis par Françoise ELKOUBY

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