Mon lexique judeo-alsacien


DE SOUKOTH A SIMHATH TORAH

SOUKOTH

LULEF SCHETTLE

Au cours de la fête de soukoth, on accomplit la mitsva (le commandement) du loulav, ce bouquet composé de quatre espèces végétales que l’on agite durant la récitation du Hallel ("lulef schettle" = agiter le loulav).


E LULEF ON E ESSRIG ("Un loulav et un ethrog")
Dans le bouquet végétal que l’on utilise pendant la fête de Soukoth, la branche de palmier est longue et mince, tandis que l' ethrog (= le cédrat) est petit et rondouillet.
L’expression "e Lulef on e Essrig" désigne un couple dans lequel le mari semble démesurément grand par rapport à sa femme, si elle est de petite taille.
Si la culture française connaît « les couples à la Dubout » (du nom d’un dessinateur célèbre dont les couples étaient formés par des personnages de tailles et de volumes disproportionnés), le juif alsacien puisait toujours ses références dans le ritualisme de sa vie juive.


ESSROGEM NACH SEKKES ("Ethrogim après Soukoth")
S’il est vrai qu’on a besoin d’un bel Essrig pour célébrer dignement la fête de Soukoth, il est vrai aussi qu’après Soukoth celui-ci n’a plus aucun usage intéressant. Qu’un cédrat arrive après la fête, il ne sert plus à rien.
On dira donc "Essrogem nach Sekkes" tout au long de l’année, chaque fois qu’un retard aura rendu une démarche vaine.

Un usage -attesté dans le Sefer ta’amé ha-minhagim, p.521- voulait qu’à l’issue de la fête de Soukoth les femmes (enceintes) arrachent avec les dents l’extrémité du Essrig. L’origine de cette coutume peut être rattachée au midrash selon lequel le fruit défendu qu’a consommé Adam, le premier homme, aurait été ... un cédrat ; en en arrachant l’extrémité du bout des dents, c’est à dire sans en tirer de jouissance gustative, la femme veut montrer que dès l’origine, Eve, la première femme n’a mangé du fruit défendu que sous la pression et la contrainte du « serpent », mais qu’elle n’en a pas davantage tiré de plaisir.

A cette signification s’est attachée la croyance que ce geste pouvait favoriser la naissance d’un enfant (mâle). Il va de soi qu’une femme âgée n’avait plus de raison valable d’avoir recours à pareil procédé. On disait ainsi d’une femme d’un certain âge : " Sie brucht ké stiel mé abbisse" ( allemand : "Sie braucht kein Stiel mehr abbeissen" = "elle n’a plus besoin d’arracher avec les dents le bout de l’essrig.
Une autre croyance populaire associait le risque de perdre la vue avec la pousse des dents chez les jeunes enfants. Pour dire d’une personne qu’elle avait passé l’âge de percer des dents, on pouvait aussi dire : "Sie word nemmi blend am zahne (allemand : "Sie wird nicht mehr blind am zahnen") = "Elle ne risque plus de perdre la vue au moment de la pousse de ses dents".


OU-VE-TSEL KENOFEKHO
Parmi les décorations traditionnelles de la sekke alsacienne, figure en bonne place l’oignon dans lequel sont plantées deux plumes d’oie. L’origine de cette coutume mérite d’être retenue :
Si la souka commémore les tentes providentielles qui ont protégé les enfants d’Israël durant les quarante ans de leurs pérégrinations dans le désert, elle évoque aussi la fragilité de l’existence puisqu’on quitte la solide demeure habituelle pour s’installer dans une frêle cabane. La souka préfigure aussi l’ère où se réalisera la prière récitée le vendredi soir et les soirs de fête dans laquelle on demande :
"ou-be-tsel kenofekho tastirénou ... ou-fross olénou soukass chelomekho" : "Que Dieu nous abrite à l’ombre des Ses ailes protectrices ... et qu’Il étende sur nous la Souka de Sa Paix".
"ou-ve-tsel kenofekho ... " : voilà une superbe occasion de faire de beaux jeux de mots polyglottes :
"Ou-be-tsel" veut dire, en hébreu, [ou=et], [be=dans], « [tsel=l’ombre], "et à l’ombre (de Tes ailes protectrices ...)" ; mais batsal, en un seul mot, désigne un oignon en hébreu ! !
Quant à "kenofekho" , qui fait irrésistiblement penser à des ailes (c’est la traduction du mot !), on va les représenter par des ailes d’oie.
Ainsi, cet oignon fiché de deux plumes d’oie évoque-t-il notre souhait de voir se réaliser nos prières pour une Paix définitive.

CHANNE RAVE (= calendrier)
HOSHANA RABA


CHANNE RAVE est le dernier jour de 'Hall Alle Moth Sékkés (hébreu : Hol ha-moëd Soukoth), la période de demi-fête de la fête de Soukoth.

Parmi les usages religieux de cette journée considérée comme le dernier jour de la période où Dieu prend les décisions qui détermineront ce que sera l'année de chacune de ses créatures, le Channe Rave Lerne, une étude (en allemand, Lernen), dans la soirée, qui se prolonge parfois jusque tard dans la nuit - peut-être même jusqu'au matin ! Il s'agit ainsi de se concilier les bonnes grâces de Dieu en Lui montrant que nous sommes prêts à consacrer nos loisirs à l'étude de sa Torah.


Au cours de l'office du matin, on utilise des Chanelich (branches de saule en bouquet) : on les saisit en récitant des textes dans lesquels on demande à Dieu "Howcha no" (d'où leur nom) , c'est-à-dire de nous venir en aide et de nous secourir.



Dans ces mêmes textes figure, comme en leitmotiv, la formule "Kol mevasser, mevasser ve-omer" : "Une voix annonce [la bonne nouvelle de la délivrance ultime]" .
Cette formule, à laquelle on apporte une légère modification, permet un jeu de mot qui est à l'origine d'un plat traditionnel que l'on consomme en ce jour : au lieu de Kol mevasser, on parle de "Kohl mit Wasser" qui en bon allemand signifie "chou bouilli dans de l'eau". Comme la fin de Sékkés correspond avec la saison du chou, on n'a pas à se demander ce qu'on va manger : le menu est tout indiqué ... dans la liturgie.


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