Tableaux
par Mirie MOUYNÉS
traduction : Liora KAHN-ROITMAN
Extrait du magazine En Exclusiva, Banco General de Panama

TABLEAU 1
Auschwitz – Birkenau
Ce message a été adressé en anglais par Mirie MOYNES, l'auteur des deux articles consacrés à Marianne GRANAT, pour les lecteurs du site.
Traduction : Catherine SAGUÈS

On n’imagine jamais le
véritable effet de nos mots

Mes mots semblaient impuissants, tellement infimes, en comparaison de la douleur et de l’horreur incommensurables que Marianne et sa famille avaient traversée. Peu importait le dégoût total que j’ai ressenti, à quel point j’avais honte : écrire cet article était le moins que je pouvais faire.
Je suppose que je pourrai trouver une consolation en pensant que je l’ai aidée à raconter son histoire; en pensant que si une seule personne, juste une, changeait sa façon d’être, pensait et agissait avec sérieux, apprenait la beauté à ses enfants et le pouvoir immense de la TOLERANCE et de l’acceptation, alors ça valait le coup.
J’ai aussi eu droit à un don du ciel : rencontrer Marianne, découvrir une nouvelle amie étonnante.
Je ne suis toujours pas certaine que mes mots, si petits et insignifiants – et de surcroît en espagnol ! – aint trouvé écho à Tel Aviv et en France. Cependant, grâce à eux, l’histoire de Marianne s’est reliée à d’autres, qui avaient perdu contact avec elle, avec son mari, Alexandre, avec leur passé volé.
J’ai toujours cru en la puissance des mots. Cette fois, les miens mont bénie plusieurs fois : par une amitié que je chérirai à jamais et par l’immense satisfaction qu’ils étaient des ponts entre de vieux amis perdus, avec le temps et la distance.
Je garde espoir qu’ils aideront d’autres personnes à construire aussi des ponts.

One can never imagine
the true effect of our words.

Mine felt so powerless at the time: so small if measured with the immeasurable pain and horror Marianne and her family had gone through. No matter how much utter disgust I felt, how ashamed I was, I wrote the article just the best I could.
I guess I could only find solace thinking that I had helped her tell her story; that if just one person, at least one, would change their ways, would think and act responsibly, would teach their child the beauty and immense power of TOLERANCE and acceptance, then it was worth it.
I was blessed by a gift then: meeting Marianne, finding an amazing new friend.
I’m still not sure how my words, small, so insignificant -and in Spanish!- found their way to Tel Aviv and France.  Through them, Marianne’s story connected to others who have lost contact with her, with her husband, Alexandre, with their stolen past.
I’ve always believed in the power of words.  This time, mine have blessed me many times over: with a friendship I will treasure forever, and the immense satisfaction that they were bridges between long lost friends, through time and distance.
I keep only hoping that they will help others build bridges too.

 

Marianne avant la guerre
TABLEAU 2
L'établissement de l'Histoire Visuelle des Survivants de la Shoah

Conscient qu'il était important de conserver le témoignage de ceux qui ont vécu l'Holocauste (survivants, témoins, ceux qui ont libéré) Steven Spielberg, après avoir achevé de filmer la Liste de Schindler a établit la Fondation de la Shoah. Les participants y évoquent non seulement la tragédie dans les camps de concentration et la perte d'êtres chers, mais également leur enfance, leur jeunesse, leurs traditions, leurs amitiés et leur famille.

"Il ne s'agit pas seulement d'enseigner l'Holocauste, mais également de promouvoir le dialogue et de faire en sorte que les jeunes réfléchissent à ce qu'ils pourront  faire afin d'éviter que la haine, les préjudices, l'ignorance et le fanatisme n'aient d'influence dans leurs vies". Les jeunes de par le monde les voient raconter leurs histoires. Ils comprennent que, derrière chaque statistique, derrière chaque fait historique, il y a une personne de chair et de sang. Ils s'identifient à eux, et prennent conscience des choses. Ils apprennent la tolérance.

En janvier 1996, alors que Marianne rendait visite à sa soeur, qui vit en Australie depuis 1950, Georgette lui raconte que la Fondation de la Shoah a pris contact avec elle. Elle ne veut pas parler de ses souvenirs. Marianne dit qu'elle le fera. C'est ainsi que son histoire a été enregistrée à côté des 52.000 témoignages de témoins et de survivants, dans 56 pays et traduit en 32 langues. La Fondation de la Shoah est integrée depuis l'an dernier (2007) à l'Université du Sud de la Californie.

TABLEAU 3
Liebe Siv

Depuis ses 13 ans et tout au long du collège, Marianne correspond avec une amie en Suède. Elles communiquent en allemand, langue universelle de l'Europe Centrale à l'époque. Elles partagent des histoires sur leurs vies, leurs familles, leurs pays. Elles s'envoient des photos.
 
Après la guerre, Siv Stridbeck a cherché son amie sur les listes de la Croix Rouge. En 1948, Siv et Marianne se rencontrent pour la première fois, à Paris. Siv lui remet un trésor : les photos qu'elle lui avait envoyées au fil des ans, des photos d'elle petite, la photo de ses 15 ans, la photo de son chien, sur son vélo, et quelques photos de ses parents. Ce sont les seuls souvenirs de son enfance.

TABLEAU 4
"Un crime sans nom"

Je suis surprise de découvrir que, jusqu'en 1946, il n'existait même pas un mot pour définir ce crime de lesse humanité. Le mot "génocide" a été inventé par le Dr. Rafael Lemkin en 1946.

"C'est avec une impressionnante régularité que l'homme s'est laisse entraîné vers la violence et le génocide tout au long de son histoire", écrit le poète et militante originaire du Chili, Gabriela Mistral, lorsque, le 12 Janvier 1951, la Convention sur le Génocide est approuvée à l'ONU. Elle ajoute, qu'en protégeant les autres, on se protège soi-même. Une atrocité commise contre le genre humain à notre époque est un crime du genre humain commis par nous tous.

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