Certificats de non-usure pour les juifs de Schwenheim
Pierre KATZ


Les juifs obtiennent la citoyenneté en France par un décret de l'Assemblée Constituante du 20 septembre 1791. Mais ce n'est qu'en 1808 que Napoléon Ier met en place, par un train de quatre décrets, les structures du judaïsme français qui subsistent encore en grande partie aujourd'hui :

Cette procédure a bien entendu été mise en œuvre pour les juifs de Schwenheim et a donne lieu a des péripéties inattendues.

Le 2 juillet 1808. Florent Geis, conseiller municipal de Schwenheim, est reçu par le sous-préfet de Saverne, auquel il a demande audience et lui expose un ensemble de griefs qu'il fait au maire, Antoine Caspar.
Ces griefs sont confirmés par écrit par une lettre  en date du 25 juillet 1808, signée par Florent Geis et par Joseph Heng, adjoint au maire de Schwenheim. Parmi ces griefs, on en note deux qui concernent la communauté juive de la localité :

Extrait de l'arrêté pris par le sous-préfet de Saverne.

Devant ce faisceau d'accusations graves, le sous-préfet de Saverne nomme un commissaire enquêteur. Monsieur Nouffert, auquel il confie la mission d'enquêter principalement sur les conditions d'établissement de la liste des certificats de non-usure et accessoirement sur les autres griefs. Celui-ci se rend le 27 juillet 1808 à Schwenheim et reçoit individuellement tous les chefs de famille juifs de la communauté locale, ainsi que le maire, le maître d'école et l'appariteur de la mairie. Le rapport d'enquête détaillé est joint en annexe ; il ressort de ce rapport les points suivants :

Devant ce rapport très détaillé et accablant, le sous-préfet de Saverne prend un ensemble de décisions graves :

Cette affaire est significative à plus d'un titre :

Le conseil municipal de Schwenheim a reconnu qu'aucun des juifs de Schwenheim ne peut être considéré comme un usurier. Il faut toutefois noter que la communauté de Schwenheim est une communauté pauvre, qui ne comprend aucun juif en mesure d'accorder des prêts d'une certaine importance.

L'âpreté au gain n'est pas un monopole des juifs et l'on trouve dans tous les milieux des hommes prêts à exploiter toute occasion qui leur parait favorable ;

Enfin, on pout s'interroger sus les motivations de l'adjoint Joseph Hong et du conseiller municipal Florent Geis, qui dénoncent les agissements du maire. A côté d'un sens civique et d'un souci d'équité à l'égard des juifs, il y a peut-être aussi l'exploitation d'une situation leur permettant de se débarrasser d'un maire et de conseillers municipaux avec lesquels ils sont en désaccord.

En conclusion, il est bon de se rappeler que l'histoire est toujours faite par les hommes, et que dans toute communauté humaine on trouve tout l'éventail des qualités et des défauts propres à l'espèce humaine. La frontière entre le bien et le mal ne passe pas entre des peuples ou des religions ; elle passe au milieu de chacun d'entre nous.


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