L'Ecole juive de Bischheim
par Moïse Ginsburger
Extrait de la plaquette LES JUIFS DE BISCHHEIM AUM SAUM, 1937


Le 24 février 1843, une demande en langue allemande signée par les membres du Consistoire et de la Commission administrative fut adressée au Conseil municipal de Bischheim en vue d'obtenir une subvention pour la construction d'une maison d'école.

Il en ressort que l'école israélite avait été fondée en 1835, qu'elle avait été placée sous la surveillance de l'autorité locale de même que les autres écoles et qu'elle comptait alors environ cent élèves.
Le loyer de la salle d'école se montait à 100 francs par an, dont 60 francs étaient payés par la commune civile.
Mais cette salle était trop petite et trop humide pour servir à l'enseignement, de sorte qu'un grand nombre de parents préféraient envoyer leurs enfants dans d'autres établissements.

Il a donc été décidé de construire une maison d'école israélite, et comme la communauté israélite ne possédait pas les moyens pour faire exécuter ce projet, elle s'adressa avec confiance à la bienveillance de la commune civile.
Le Conseil municipal de Bischheim vota une somme de 3.000 francs pour secours à la construction d'une maison d'école.
La Communauté avait fait l'offre de fournir à ses frais le terrain pour l'emplacement de la dite école et de subvenir aux frais d'entretien.

Le 1er août, les membres de la Commission administrative adressèrent une demande au préfet, où il est dit :

qu'à défaut d'une maison d'école propre, l'école primaire israélite avait été disloquée cinq fois depuis quinze ans. Ces fréquents changements de local prouvent qu'aucun des locaux successivement occupés et abandonnés par l'école n'était convenable ni sous le rapport de l'espace ni sous celui des autres conditions indispensables pour une salle d'école. Outre leur exiguïté, leur humidité et leur défaut de lumière, la plupart de ces salles au premier étage présentaient encore des dangers sous le rapport de mauvais escaliers, où les enfants sont obligés de monter et de descendre plusieurs fois dans la journée. La salle d'école actuellement occupée qui est reconnue la meilleure de la commune qui soit propre pour le service d'une école, a encore de graves inconvénients en ce qu'elle est trop petite, privée de lumière, et d'une humidité telle que les livres, cartes et tableaux qui y sont pour l'usage de l'école, dépérissent en peu de temps par la grande humidité, dont ils sont trempés, surtout en hiver. Avec les dépenses continuelles qui sont occasionnées par le fréquent renouvellement des tableaux etc. placés dans l'école.
Cette humidité est encore une cause d'insalubrité très préjudiciable à la santé des instituteurs et des élèves. Aussi et surtout dans les saisons pluvieuses, un grand nombre d'élèves sont attaqués de rhume violent qui les empêche de fréquenter l'école. Il est notoire que beaucoup de parents dans l'intérêt de conservation de la santé de leurs enfants les font quitter l'école, et de cette désertion souvent nombreuse il résulte nécessairement une interruption d'enseignement préjudiciable pour l'instruction de la jeunesse et par suite une diminution sensible des revenus de l'école.

Pour remédier à cet état de chose insupportable et vu l'impossibilité de se procurer dans la commune un local convenable pour l'école israélite, la communauté israélite a cru devoir s'imposer un sacrifice pour subvenir par souscription volontaire aux frais de construction d'une école israélite.
Mais malgré tous les efforts n'ayant pu parvenir jusqu'à présent qu'à se procurer le terrain qui doit servir d'emplacement pour l'école, les soussignés ont sollicité auprès de leur administration locale un secours pécuniaire de 3.000 francs que le Conseil municipal a bien voulu promettre d'accorder aussitôt que les ressources de la Caisse communale le permettront. Cependant comme il y a urgence de hâter la construction d'une salle d'école israélite et informés que la commune venait de toucher des fonds suffisants du produit des bien communaux tombés dans le Canal de la Marne au Rhin, se trouve désormais en mesure de réaliser sa promesse du secours de 3.000 francs pour un objet d'une si grande urgence et d'un intérêt aussi majeur pour l'instruction de la jeunesse.

Les soussignés osent vous supplier, M. le préfet, de vouloir bien inviter M. le Maire et le Conseil municipal de Bischheim de voter le crédit de 3.000 francs à titre de secours promis pour la construction de l'école israélite. Persuadés que le Conseil municipal pénétré et instruit lui-même de l'état déplorable et insalubre de la salle d'école actuelle et de l'impossibilité de se procurer un local plus approprié et attendu la considération qu'au moyen du dit secours la caisse communale sera à tout jamais déchargée d'une dépense de 60 francs par an qu'elle est obligée de payer pour le loyer de la salle d'école, dépense qui pourrait s'augmenter au triple, si l'instituteur venait de réclamer une indemnité de logement pour lui et sa famille, n'hésitera pas un instant à répondre à vos ordres.

Cette lettre était signée par Emanuel Klein, commissaire surveillant, Lehmann Weill, Léopold Lévy, Abraham Sternheim, Selligmann Hirschmann, Simon Lévy, Ahraham May et Lazard Reisse, le vieux.

Le préfet avait accordé une somme de 500 francs sur le produit des amendes de police.
Mais les frais de construction étaient estimés à 5.500 francs, de sorte qu'il fallait trouver encore un montant d'environ 2.000 francs, ce qui fit retarder la construction de l'école jusqu'en 1847.

Le 5 mai 1844, les membres du Comité d'administration présentèrent une nouvelle pétition au Maire et au Conseil municipal de Bischheim, dont voici les passages essentiels :

Les administrateurs de la Communauté israélite de Bischheim, sur la communication qui leur a été faite par M. le Maire de cette commune des plans et devis et avant-métrage du projet de construction d'une maison d'école israélite à Bischheim et dont la dépense est évaluée à 9.150 francs, et M. le Maire ayant invité les dits administrateurs à se prononcer sur le concours qu'ils ont offert pour les frais de la dite construction.
Considérant que la communauté a procuré à ses frais le terrain pour l'emplacement de la dite maison d'école, que les habitants israélites ayant encore à acquitter une dette de 7.000 francs sur la dépense de la construction de leur nouvelle synagogue.
Dans cet état de choses pénible, les soussignés osent exprimer leur vif regret de ne pouvoir actuellement s'engager davantage à aucune part de dépense contributive pour les frais de construction de la maison d'école israélite, qui désirant cependant voir accomplir leur voeu si souvent exprimé pour la construction d'une salle d'école israélite, les soussignés, vu que l'instituteur et l'aide-instituteur ont leur logement particulier, de sorte que pour bien longtemps encore on peut se dispenser d'un logement pour les instituteurs, ils offrent au nom de leur communauté de renoncer à la construction des deux logements aux instituteurs, de sorte que la construction se bornerait aux deux salles d'école au rez-de-chaussée. Tout l'étage supérieur devenant alors inutile, la dépense doit subir une réduction sensible.

Le 13 août 1845, la Commission administrative fit remettre une pétition exposant cet état de choses au préfet dans l'audience qu'il avait accordée à Abraham May.
Elle fut accueillie favorablement. Le préfet donna ordre à M. Bauer, chef de la 4e division, de s'en occuper de suite.

Mais des mois passèrent encore sans résultat positif. Les administrateurs de la communauté s'adressèrent donc, par une lettre datée du 12 décembre 1845, à M. Cerf Beer, Lieutenant-Colonel d'Etat-Major à Paris, et lui exposèrent la triste situation, dans laquelle se trouvait la communauté par suite de l'exiguïté et de l'insalubrité de son école, et le prièrent de provoquer auprès du Ministre de l'Instruction publique un secours de l'Etat pour la construction d'une école israélite à Bischheim, lieu de naissance de ses parents.

Dans sa réponse, Cerf Beer rendit attentifs les administrateurs que, pour arriver à un résultat satisfaisant, il fallait suivre la marche ordinaire des affaires dont les Ministres eux-mêmes ne pouvaient s'écarter. Il fallait donc que l'affaire fût instruite, c'est-à-dire qu'elle fût transmise au Ministre avec toutes les formalités que les Bureaux de la préfecture connaissaient parfaitement.

"C'est seulement alors que mon intervention pour vous pourra être utile, et vous pouvez compter qu'elle vous manquera d'autant moins que je suis très grand partisan des écoles surtout pour les enfants de notre culte. Ce que je vous seconderai de tout mon pouvoir. Pressez donc à la préfecture l'envoi de votre demande, informez-moi de son départ, et moi, de mon côté, je ne négligerai rien pour arriver à un bon résultat . . ."

Les administrateurs avisèrent Cerf Beer, par lettre du 24 décembre 1845, qu'ils s'étaient adressés de suite à la préfecture et que celle-ci leur avait indiqué la date et le bureau du Ministre, où les pièces en question avaient été adressées.

Le 13 juillet 1846, la communauté vota une subvention de mille francs pour couvrir l'excédent du prix d'adjudication de la construction d'une nouvelle maison d'école israélite à Bischheim, si le dit prix d'adjudication devait excéder la somme de quatre mille cinq cent francs, qui était créditée et disponible pour la construction de la dite école et dont la dépense était estimé à 5.500 francs suivant avant-métrage dressé par l'architecte d'arrondissement du 15 décembre 1844...

Après la cérémonie tous les enfants conduits par l'instituteur se rendirent à la Mairie pour remercier l'autorité locale pour avoir contribué à l'édifice consacré à l'instruction des jeunes Israélites de la Communauté.

Une notice concernant l'inauguration de l'école fut publiée dans le Courrier du Ras-Rhin au N" 127 du 27 mai 1848.

La réception du bâtiment de l'école eut lieu 14 - 20 juin 1848 par Birqué, délégué de l'architecte Morin, en présence du Maire Schaub, Hégmann, adjoint, Mai Abraham, Bachmann et Vurm, entrepreneurs, et Kuppenheim, instituteur.


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