JOSEPH (JOSSELMANN) BEN GERSHON DE ROSHEIM
(1478 -1554)
par le Grand Rabbin Max Warschawski

BiographieUne des figures les plus prestigieuses du judaïsme alsacien au moyen-âge fut, sans aucun doute, Joseph fils de Gershon Loans, plus connu sous le nom de Josselmann de Rosheim.

La famille vivait à Endingen dans l'État de Bade, où trois de ses oncles furent massacrés en 1470 sous l'accusation de meurtre rituel. Lors de l'expulsion des Juifs d'Endigen, la famille Loans s'installe à Obernai, d'où elle s'enfuit en 1476 après les campagnes de pillage de mercenaires suisses, puis à Haguenau en 1476. Est-ce là que naquit leur fils Joseph qui sera le plus célèbre des chtadladim d'Allemagne ?
Le Chtadlan était le porte-parole, le défenseur de sa communauté auprès des autorités.

En 1507, les Juifs qui avaient été expulsés d'Obernai firent appel à lui pour intercéder auprès des autorités provinciales et de l'empereur afin de faire abroger le décret d'expulsion. Ayant rempli sa mission avec succès, il fut nommé en 1510, avec Rabbi Zadoc, parnass ou-manhig (président et chef) des Juifs de Basse-Alsace.

Josselmann sur une peinture murale de l'Office du Tourisme de Rosheim (détail)

C'est à Mittelbergheim que Josselmann s'établit comme commerçant et comme prêteur d'argent. En 1514, les Juifs de Mittelbergheim furent accusés de profanation d'hosties. Josselmann parvint à prouver leur innocence. Il s'installa alors à Rosheim où il demeura jusqu'à sa mort.

Pendant plus de quarante ans, Josselmann fut le défenseur de ses coreligionnaires en Alsace, puis, de plus en plus, des Juifs de l'Empire. Il interviendra avec beaucoup de courage auprès de Maximilien, puis auprès de son petit-fils et successeur, Charles Quint.

En 1515 et 1516 il défendit devant Maximilien les Juifs d'Obernai menacés d'expulsion, et lors de la guerre des paysans, il parvint à détourner les révoltés de Rosheim en échange d'une rançon de 80 guilders.

Lors du couronnement de Charles Quint en 1520, Josselmann obtint des lettres de protection pour les Juifs de l'empire, que l'empereur renouvella dix ans plus tard.

Dès lors il fut considéré comme le Parnass ou Manhig (chef) du judaïsme de l'empire, et se présenta comme le Regierer des Juifs. On l'appelait à intervenir à tous moments pour écarter une menace d'expulsion ou pour combattre de fausses accusations de meurtre rituel ou de profanation d'hosties.

C'est ainsi qu'on le vit en Brabant défendre les Juifs d'Allemagne, en Bohème pour les Juifs de Prague, en 1537 pour défendre les Juifs de Saxonie menacés d'expulsion.

Comme gouverneur ("Regierer") des Juifs, Josselman élabora un règlement concernant le commerce d'argent.

A Augsbourg, en présence de l'Empereur, il participa à une disputation avec un apostat Antonius Margarita, auteur de l'ouvrage antisémite Der gantz juedisch Glaub (1530). Il triompha de son adversaire, qui dut quitter la ville.

Parler de toutes les interventions de Josselmann de Rosheim dépasserait le cadre de cette notices : on citera par exemple les interventions lors d'accusations de meurtres rituels (Haguenau ; Hongrie en 1529 ; Silésie en 1535 ; Wuerzburg en 1544), ou de profanation d'hosties (martyrs de Brandebourg en 1539).

Josselmann de Rosheim était l'auteur d'un ouvrage, le SEFER HA-MINKNA, dans lequel il s'inspirait surtout du Derekh Emunah d'Abraham Bibago, en sautant les passages kabbalistiques. Toutefois il collectionnait pour lui-même des fragment de textes de la kabbale, et avait même conçu le dessein d'écrire et de reproduire le Ginnat Egoz de Josef Gikatilia.
L'ouvrage de Josselmann a été édité en 1970 par Hava
Fraenkel -Golschmidt chez les Mekize Nirdamim.

Merci au Professeur Roland Goetschel de nous avoir communiqué ces informations.

Pendant la guerre impériale contre les princes protestants, la Ligue Smalkaldique, en 1546, il intervient au nom des Juifs, qui étaient persécutés par les deux camps.

En 1548, il est à nouveau contraint de faire appel à l'Empereur avec une plainte contre les villes d'Alsace.

Il est possible que Joseph de Rosheim ait été le débateur juifs dans la controverse avec Calvin, relatée dans la publication de ce dernier Ad quaestiones et obiecta Judaei cuiusdam Responsio.

Son intervention en faveur des Juifs de Colmar se poursuit jusqu'en 1551, lorsqu'à la Diète impériale d'Augsburg il agit contre les sévères restrictions imposées aux Juifs pour le prêt d'argent, et la menace d'expulsion des duchés de Wuertemberg et de Bavière.

Ses dernières interventions concernèrent une fois de plus les Juifs d'Alsace, quand il vint à l'aide de ceux de Dangolsheim et de Rosheim.

En 1543 il dut se défendre contre un pamphlet de Luther, Von den Juden und ihrer Lüguen (Les Juifs et leurs mensonges).

Un an auparavant, il était parvenu au Reichtag à Ratisbonne, comme représentant des Juifs de l'Empire germanique, à empêcher la promulgation d'un édit destiné à leur interdire le commerce de l'argent.

Il est difficile, dans ce cadre, de montrer combien les interventions de Josselmann étaient dangereuses pour lui : traverser l'Allemagne, d'une cour à l'autre, pour intervenir en faveur de ses coreligionnaires, c'était risquer sa vie sur les routes, ou même auprès des personnages qu'il désirait rencontrer.

Selon certains historiens, Josselman, en partant pour défendre ses frères, portait sous ses habits de cour le sargueness, afin que s'il devait perdre la vie, il soit enterré avec ses vêtements mortuaires.

L'ancienne ville de Rosheim - tableau exposé à l'Office du Tourisme

Il mourut en 1554, à Rosheim selon la tradition. Mais il n'existe aucune trace de sa tombe, car les pierres tombales du cimetière de Rosenwiller ne subsistent qu'à partir du 18ème. A défaut d'une stèle, l'histoire de cet homme exceptionnel s'est maintenue à travers les siècles.

En 1954, la jeunesse juive de Strasbourg a célébré le quatrième centenaire de sa mort. C'est la dernière fois que la synagogue de Rosheim a connu une affluence extraordinaire. Mais n'était-ce pas un juste hommage rendu à celui donna sa renommée à cette communauté d'Alsace et à son cimetière de Rosenwiller ?

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