Abraham SCHÜLER
médecin-chef à l’Hôpital Israélite de Bâle
1900 - 1959
par Christophe SANCHEZ
Extrait de HEGENHEIM BUSCHWILLER 2022 - Bulletin du Cercle d'Histoire de Hégenheim Buschwiller

Dans les prochains bulletins, nous aimerions relater l’histoire de la médecine, des soins à Hégenheim. Cela peut se traduire par des biographies comme celle-ci de médecins, dentistes, spécialistes originaires du village, ou des anecdotes ou encore tout autre document qui pourrait nous aider. N’hésitez pas à contacter les membres du cercle.

Abraham Schüler (1900-1959) est le fils aîné du dernier rabbin de Hégenheim, Salomon Schüler qui exerça à Hégenheim jusqu’au transfert du rabbinat à Saint-Louis en 1906.

"Seul un homme bon peut être un bon médecin", si cette phrase de Nothnagel s’applique à quelqu’un, c’est bien au docteur Abraham Schüler, médecin généraliste, décédé le 16 août 1959 à Bâle en pleine activité professionnelle. Né à Hégenheim, le 2 mars 1900, A. Schüler a fréquenté l’école primaire de Saint-Louis, puis le lycée humaniste de Bâle. En tant qu’Alsacien, il dut s’engager dans l’armée allemande peu après avoir obtenu son baccalauréat.

Le Dr. Schüler souffrit toute sa vie des conséquences d’un empyème grippal contracté à l’armée ; ce n’est qu’en 1958 qu’un morceau de drain en caoutchouc laissé lors de l’opération de l’empyème fut reconnu comme étant la cause des abcès et des empyèmes récurrents et qu’il fut retiré. Mais la résistance physique du médecin, qui ne ménageait pas sa personne et travaillait sans relâche malgré sa santé affaiblie, était brisée.

Démobilisé à la fin de la première guerre mondiale, A. Schüler étudie la médecine à Bâle et termina ses études - après une interruption due au service militaire dans l’armée française - par l’examen d’État en 1925. Il étudie ensuite deux années supplémentaires la médecine à Paris, où il passe l’examen de fin d’études français et obtient le titre de docteur en médecine.

Après deux ans d’assistanat auprès de l’excellent interniste bâlois Rudolf Staehelin, le Dr. Schüler s’installe en 1930 comme médecin généraliste à Bâle, qui est devenue sa deuxième patrie.
Il peut avoir l’autorisation d’ouvrir un cabinet à Bâle (ce qui était interdit aux étrangers) grâce à son rôle de médecin du travail pour les employés français de la gare de Bâle ainsi que ceux du consulat français.

En 1939, il doit rejoindre l’armée française en tant qu’officier, et après la débâcle et la mise en place du régime de Vichy, il est dégradé, car de confession juive. Il a retrouve alors son cabinet bâlois.

Pendant 29 ans, il exerce dans la ville rhénane en tant que praticien très apprécié de tous, en comme médecin-chef de l’hôpital israélite pendant de nombreuses années ; c'est aussi un ami infatigable des malades, des opprimés et des pauvres.

Son humanité, sa volonté fanatique d’aider et de lutter contre la souffrance, la détresse et la misère, son excellente double formation médicale dans deux pays et, enfin, ses efforts consciencieux pour se tenir au courant des dernières connaissances médicales grâce à une formation continue, font du Dr Schüler un médecin exemplaire à tous points de vue. Ses patients peuvent le joindre jour et nuit, malgré son état de santé souvent critique, lui qui ne fait pas de différence entre riches et pauvres, entre les patients de l’assurance maladie et les patients privés. C'est un médecin pour qui le bien-être de ceux qui viennent chercher soulagement et guérison auprès de lui est tout, mais pour qui sa propre santé menacée et sa situation matérielle ne signifient rien.

Il va de soi qu’à l’époque malheureuse du régime national-socialiste, un homme de la qualité humaine du Dr. Schüler a le devoir évident de s’engager et de s’occuper des réfugiés et des émigrés, ce qu’il fait de manière exemplaire.

Malgré sa surcharge de travail, le Dr. Schüler fait partie des visiteurs les plus fidèles et les plus reconnaissants des manifestations scientifiques de la Basler Medizinische Gesellschaft, de la Basler Naturforschende Gesellschaft et de la Schweizerische Natur for sehenden Gesellschaft. Tout comme il y a de bons et de mauvais professeurs, il y a aussi de bons et de mauvais auditeurs. La présence d’un bon auditeur donne au professeur le sentiment gratifiant que ses efforts ne sont pas vains. Le Dr Schüler est un bon, voire un excellent auditeur, toujours reconnaissant pour ce qu’on lui enseigne, capable, grâce à son esprit critique et aiguisé, de distinguer en toute chose le bon grain de l’ivraie, sans préjugés et ouvert à toute nouveauté, et pourtant - conformément à sa formation et à ses convictions humanistes - toujours déterminé à défendre, dans le respect des traditions et de manière conservatrice, les valeurs spirituelles et éthiques ainsi que la liberté et l’indépendance de sa chère profession.

La présentation de la personnalité du Dr Schüler serait incomplète si l’on ne mentionnait pas sa vaste culture générale, son intérêt pour les langues anciennes et nouvelles, la poésie, la littérature et l’histoire, ainsi que son sens de l’humour jamais pris en défaut.

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