Témoignage de Susann Gemund Karcher
Architecte
mars 2010

 

Vue du bain médiéval depuis l'entrée
Il y a quelques semaines, j’ai gagné un livre qui venait juste de sortir : Die Leinwand, de Benjamin Stein.
J’étais fascinée par ce roman dont le moment clé se passe dans une mikve dans un lieu appelé Moza, près de Jérusalem. Ce livre a réveillé en moi beaucoup d’images, celles de Jérusalem, que j’avais eu la chance de visiter à seize ans, à Pâques, sous un voile de neige. Puis un peu plus tard, lors de mes études d’architecture, à Strasbourg.
Passionnée par les vielles pierres, je voulais en savoir plus sur le génie du lieu.

Lorsque la nouvelle de la démolition de l’imprimerie nous était arrivée, nous avions juré de tout faire, pour sauvegarder ce lieu magique. Avec une collègue, je me suis alors retrouvée dans ces bâtiments aux locaux désaffectés, afin d’en faire un relevé, puis un projet de réhabilitation, avec logements, lofts etc…Quelle ambiance: une fois le porche franchi, au milieu de la cour intérieure, tout était rythmé aux couleurs de la brique rouge avec une harmonie de fenêtres bien rangées et la maisonnette d’accueil, au centre, rappelait l’heure avec son horloge élégante. L’ensemble était construit dans le style Napoléon III, unique à Strasbourg. L’intérieur sentait encore le papier avec tous les souvenirs de ceux qui y avaient laissé tant de leur temps…Des belles colonnes en fonte donnait un cachet très particulier à l’espace intérieur, et la cheminée en briques marquait le paysage urbain, à l’extérieur de la parcelle. Il y avait des combles, nous passions d’une époque à une autre, sous les toits, nous retrouvant dans des vieilles maisons, dont les façades longeaient la rue des Charpentiers.

Puis je me souviendrai toujours de ce bâtiment exceptionnel, maison chargée d’histoire, avec une petite cour intérieure aux galeries de bois sculptées. Puis, je ne sais plus comment, nous voilà dans une cave dont les murs en pierre me faisaient penser aux châteaux forts, que j’aimais tant. Un très bon ami spécialisé dans des mouvements de sauvegarde était alerté et essaya de monter un dossier, afin de sensibiliser les services du Palais du Rhin. Puis le verdict nous avait profondément déçu : démolition.

Mais, dans une maison, les responsables des Monuments Historiques avaient fait une découverte : un bain rituel juif. J’étais très heureuse, comme soulagée, une voix intérieure me disant : ne t’inquiète plus, Cette Maison, sera sauvée. La suite, vous la connaissez : il s’agit de la maison rue des Charpentiers, avec la mikve.

 


© A . S . I . J . A .