50ème anniversaire de l'arrivée de nos frères d'Algérie - 2
Brochure éditée par la Communauté israélite de Metz


1962-2012, 50 ans après... Sépharades à Metz
par Ralph DAHAN,
Membre de la Commission administrative de la Communauté Israélite de Metz et responsable du Myniane sefarade

La totalité des juifs d'Algérie quittera le pays natal, avec des plaies au coeur et à l'âme jamais refermées.

Exilés, déracinés, fatigués après un long voyage, traversée de la Méditerranée, venant de Marseille avec pour seuls bagages les souvenirs du bled. Metz, qui a entendu parler de cette ville ? Et pourtant le train arriva un beau matin de juin 1962. Nous n'oublierons pas l'accueil sur le quai, par M. le Grand Rabbin Dreyfus (za"l), le Vice-Président Me Paul Lazarus (za"l) et notre sympathique ami Claude Rosenfeld (Cloclo), un petit mot gentil à chacun, un sourire, car le moral avait disparu. Il fallait reconstruire l'avenir.

Beth Yossef-Ascher avant rénovation, Raphaël Dahan et Jacob Benchetrit.
Dès leur installation dans la ville, les Sépharades ont eu à coeur l'organisation des prières propres à leur rite dans des différents lieux (Metz, Montigny-lès-Metz, Woippy...), avant de trouver naturellement, après deux déménagements, leur place actuelle au sein de la Communauté. MM. le Rabbin Touitou (za"l), Léon Maman (za"l) et Joseph Pinto (za"l) et d'autres bénévoles encore, assuraient la conduite des offices.

Il est maintenant évident que l'office Sépharade est devenu une composante essentielle et incontournable de notre Communauté, sans compter l'apport culturel, le dynamisme et la cuisine de là-bas.
En 2000, les locaux, transformés et inaugurés par le Grand Rabbin de France Joseph Sitruk, ont pris le nom de Beith Yosseph-E'hal Asher (en mémoire du père des principaux artisans et bienfaiteurs de cette rénovation), MM. Nigri et Dahan ainsi que de M. E. Safra (za"l). Merci, Léon... Elalouf pour son dévouement, sa présence et qui a su diriger son Kahal (pas toujours facile au début), tel un grand chef
d'orchestre, il nous a laissé un vide non comblé à ce jour. Nous attendons son remplaçant. Actuellement, les offices sont dirigés tant bien que mal par des bénévoles.

Il est à noter que des Séphardim occupent ou ont occupé d'importantes responsabilités au sein de la
Communauté. Je ne tiens à citer personne, afin d'éviter les oublis pouvant froisser des susceptibilités.


L'arrivée des Rapatriés d'Afrique du Nord à Metz
par Claude ROSENFELD

La vie est jalonnée de moments d'intenses émotions, de dates qui marquent une existence, enfin, de rencontres d'hommes et de femmes d'exception qui ont laissé derrière eux des traces indélébiles de leur passage.
C'est dans le cadre de mes fonctions d'animateur des jeunes de la Communauté de Metz, que la date du 18 juin 1962 restera gravée dans ma mémoire.
Ce matin là, la Préfecture de la Moselle informait les responsables du Consistoire et de la Communauté de l'arrivée au lendemain de rapatriés d'Afrique du Nord venant de Marseille, parmi lesquels se trouvaient probablement des familles juives.

Le lendemain, à leur descente du train, les voyageurs, hommes, femmes et enfants furent accueillis au centre de Transit de l'Armée situé sous la gare de Metz par le Grand Rabbin Dreyfus (za"l), le Président de la Communauté Henri Lévy (za"l), Henri Wahl (za"l), représentant le Consistoire, Paul Lazarus (za"l), Raymond Franck (za"l) et moi- même.
Un goûter avait été préparé à leur intention par les autorités locales. Nous avons pu reconnaître les familles juives à leur seule préoccupation : celle de savoir si le goûter servi était… Cascher !

Ce souci fort compréhensible pour des personnes pratiquantes, nous a permis de faire la connaissance de chacune des familles juives arrivées de Marseille.
Nous avons pu effectuer leur recensement : entre autres, Mardosché Sebban, son épouse Sarah, leurs enfants, Maurice, Denise, Evelyne, Jacqueline, Edith et Pierre ; Jahnia Benichou, son épouse Rana, leurs enfants, Gisèle, Rachel, Marcel, Annie, Josette, Alain et Brigitte ; Addi Bittoun et sa soeur Noumi ; Ichoua Sebbane, son épouse Guenouma et leur fils Paul ; Chalom Tordjman, son épouse Aziza et leurs enfants Albert et Jacqueline ; Vivine Lévy-Chapira, ses enfants, Mireille, Danielle, Marcelle, Joelle et Erick ; Barok Lévy-Marceau, son épouse Mériam ainsi que leurs enfants, Viviane, Louis et Chantal ; Eliaou Chalom Lévy, son épouse Jeanne et leurs enfants, Jean-Marc, Chantal et Michèle Yochai et Hallèle Touitou ; Yamine Soudri-Benhamou.

Le staff de la colonie de vacances de Gorze (2ème session 1962)
Ce 19 juin, il pleuvait, il faisait froid, les arrivants étaient moralement et physiquement épuisés, et n'étaient pas préparés à affronter notre rude climat. Les dirigeants communautaires affrétèrent immédiatement un bus pour emmener tous les arrivants au home israélite où les attendaient les responsables de la Société des Dames, du Bon-Coeur et de
la WIZO pour les équiper en vêtements chauds.

Par la suite, ils seront hébergés, d'abord à la colonie de vacances communautaire de Gorze où ils resteront pendant un mois. Nous fûmes dans l'obligation de créer des espaces séparés dans les vastes dortoirs au moyen de couvertures et de draps afin donner un peu d'intimité à chaque famille. Après quelques jours passés à Gorze, des logements provisoires furent mis gracieusement à leur disposition rue de Pont-à-Mousson par MM. Roger et Gaston Lévy. D'autres membres de la communauté comme M. Sylvain Binn et son épouse prirent en charge des enfants. Partout, l'élan de solidarité fut manifeste, spontané et profond.

Mon épouse et moi-même avions momentanément quitté la communauté de Bouzonville (au grand dam de ses membres) où nous étions en fonction pour diriger cette "colonie de vacances hors normes". Des jeunes de toute la Moselle avaient gentiment offert leur aide comme "moniteurs" bénévoles pour encadrer les enfants.
La restauration traditionnelle proposée à nos hôtes ne semblait pas leur convenir, jusqu'au jour où, à notre demande, deux dames du groupe vinrent faire le marché avec nous pour acheter le matériel (couscoussiers) la semoule et les épices nécessaires auprès de commerçants Maghrébins installés rue des Allemands à Metz, afin de confectionner les repas auxquels ils étaient habitués.
C'est à cette occasion que nous avons découvert le… couscous !
De retour des courses, nous pensions qu'enfin nos hôtes allaient manger de bon appétit, mais pas du tout ! Seule une partie d'entre eux était satisfaite. Renseignements pris, nous apprîmes ainsi avec étonnement que les couscous d'Oran, d'Alger ou de Constantine, étaient totalement différents et variaient selon les ingrédients, surtout les légumes qui accompagnaient semoule et bouillon. Il fallut trouver un modus vivendi et instaurer un roulement pour la confection du couscous afin de donner satisfaction à tous quelle que soit leur origine géographique.

Fin juin, les familles prenaient possession, les unes après les autres de leur appartement provisoire. En attendant, les enfants participaient à la colonie qui débutait en juillet.
La famille Sebbane Ichoua, son épouse et leur fils Paul, demandèrent avec insistance la possibilité de nous suivre à Bouzonville ou ils restèrent quelques semaines en pension chez nous, avant de trouver un appartement dans la localité où ils s'installèrent définitivement.

Très rapidement, le besoin d'une synagogue pour nos arrivants Séfarades se fit sentir.
La famille Touitou, proposa de faire un office dans son appartement, avec deux rouleaux de la Torah rapportés d'Algérie et deux autres offerts par la communauté messine.
Par la suite, M. Léon Maman créera un deuxième minyan au centre communautaire où désormais fonctionneront les offices des trois sensibilités religieuses : lorraine, polonaise et séfarade.
Chaleureuse, unie malgré ses chamailleries (les Oranais n'avaient pas tout à fait les mêmes rites que les Algérois ou les Constantinois). La communauté Séfarade attirera plus tard des fonctionnaires ou des militaires qui choisiront Metz comme lieu d'une retraite souvent active. Ce fut le cas de MM. Jacques Hazan, Jacob Benchetrit et de quelques autres. Rapidement, Aschkenazes et Séfarades allaient nouer des alliances matrimoniales, sûr indice de l'évolution des mentalités.

Ainsi, comme l'a écrit Jean-Bernard Lang dans le bulletin de la communauté de Metz, une nouvelle génération allait pouvoir éclore avec "un pied sapin et un autre pied palmier". Elle pourra être aussi fière de l'un que de l'autre.

Ref : Articles bulletin de la communauté de Metz, J.B. LANG, Eliane GERSTENHABER.


Un nouvel apport au judaïsme mosellan :
l’arrivée des Rapatriés d’Afrique du Nord
par Jean-Bernard LANG
(texte publié dans le bulletin des communautés avec l’autorisation de l’auteur).

Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, la France se débattait dans le douloureux problème de la décolonisation. Après la perte de l'Indochine en 1954, avait éclaté quelques mois plus tard (le 1er novembre) une nouvelle insurrection, en Algérie cette fois. Animés à la fois par la passion indépendantiste mais aussi par l'affirmation de leur identité, qui, face aux Français, ne pouvait qu'être définie, au moins en partie, par l'Islam, les combattants algériens ne se soucièrent aucunement d'associer les Juifs de leur pays au combat qu'ils menaient. L'auraient-ils fait qu'il est d'ailleurs douteux que ceux-ci auraient répondu favorablement.

Dès les années 1840, la France se préoccupait de leur accorder un statut séparé. Les gouvernements étaient sollicités à la fois par leurs représentants, mais aussi par le Consistoire Central. Tous leur demandaient de prendre des mesures qui, à terme, devaient "régénérer" les Juifs algériens comme l'avaient été ceux de l'Est français. Malgré l'opposition des colons et des généraux (Bugeaud comme Lamoricière étaient antisémites), les Juifs libéraux français, avec Adolphe Crémieux à leur tête, finirent par obtenir au tout début de la IIIe République (octobre 1870) qu'un décret naturalise automatiquement tous les Juifs d'Algérie. Devenir Français à la différence de leurs anciens compatriotes algériens musulmans, leur destin venait de changer. Mais à l'heure du soulèvement nationaliste, ceux-ci n'étaient plus tenus de les considérer comme leurs.

En janvier 1961, le gouvernement présidé par le Général de Gaulle organise un référendum sur l'autodétermination du pays. Le "oui" l'emporte à 73 % et en avril suivant, s'ouvrent les pourparlers d'Evian. Les opposants favorables à l'Algérie Française se regroupent dans l'OAS et déclenchent un terrorisme parallèle à celui du FLN

Dès l'automne 1961, tout le monde sait désormais que la conférence d'Evian s'achemine vers la reconnaissance de l'indépendance algérienne, et que le terrorisme des deux parties n'aura servi qu'à rendre impossible toute cohabitation future entre algériens musulmans d'une part, Pieds-Noirs et Juifs de l'autre. L'exode est donc inévitable et par lettre circulaire du 10 octobre 1961, le Consistoire Central demande aux Consistoires départementaux de recenser leurs possibilités d'accueil, de logement et d'embauche.

Parmi les responsables consistoriaux, on a encore en mémoire l'accueil timide que les Juifs avaient fait à leurs frères d'Europe de l'Est et que la persécution nazie, par la suite, a peint aux couleurs de l'ignominie. D'ailleurs les personnes d'origine polonaise désormais présentes dans ces instances, en ont parfois été les témoins. D'où un sentiment de culpabilité et une volonté déterminée de ne plus refaire les mêmes erreurs. La situation économique n'est plus identique. En 1930-35, la France était frappée par la crise mondiale et secouée par le chômage, l'instabilité politique et sociale. En 1961-62, on est au beau milieu des "Trente Glorieuses", mais naturellement l'expression est inconnue à l'époque et peu de gens, à l'exception peut-être des experts, se rendent compte de l'incroyable amélioration du niveau de vie général. D'où à nouveau des attitudes bien frileuses. A la lettre circulaire du Consistoire Central, certaines communautés répondent par une fin de non-recevoir, d'autres indiquent qu'il n'y a que de maigres possibilités d'emploi, uniquement dans les métiers du bâtiment, de la sidérurgie et de la chimie, mais Metz qui, en décembre, n'avait pas encore répondu, allait cependant être plus tard la cheville ouvrière de l'accueil.

Cependant, en mars 1962, les accords d'Evian sont signés, en avril Michel Debré démissionne et en mai le FLN et l'OAS signent une trêve. L'exode commence. Dans toutes les communautés, où l'on s'est enfin rendu compte de l'urgence, on se met à l'oeuvre. Il était temps, début juin, les premiers réfugiés arrivent. Certains ont depuis plusieurs années préparé leur venue en métropole et y ont installé des comptes en banque, parfois loué ou acheté des appartements, ou monté des affaires. Ce n'est pas le cas des plus pauvres, de tous ceux qui n'avaient jamais traversé la Méditerranée, si ce n'est pour accomplir leur service militaire ou, pour les fonctionnaires et militaires, nombreux parmi eux, pour bénéficier de congés (une fois tous les deux ans) que leur accordaient leurs administrations. En autre, la plupart sont très religieux et appréhendent un pays où même les Juifs leur semblent étranges, pratiquant, des rites pour eux inconnus, et semblant scandaleusement éloignés de la pratique scrupuleuse de la Cacherouth. Celle-ci, sera d'ailleurs, pour beaucoup, leur grand sujet de préoccupation, y compris sur les navires de l'exil, où, logés dans des conditions souvent précaires, voire indignes, ayant, laissé derrière eux leur mode de vie et leurs biens, coupés de leur famille et de leurs amis, ils refuseront de manger de peur d'accepter des aliments interdits.

Ecoutons la jeune Viviane Lévy. Elle a 18 ans, sa famille est originaire de Guelma, dans le Constantinois, mais ils vivaient depuis plusieurs années à Bône. Le père est coiffeur, elle-même a fait son apprentissage dans la même profession. Avec les Arabes, les relations sont pour le moins ambiguës. La famille emploie une femme de ménage musulmane depuis des années, elle fait pour ainsi dire partie de la famille, mange à leur table, a vu grandir les enfants. Un jour, à table justement, la voilà qui balaie d'un regard satisfait le petit logement et annonce tranquillement au père de famille : "tout cela va bientôt être à moi". On aurait pu penser qu'on l'aurait mise de suite à la porte. Mais non, il y eut une grosse dispute, mais rien ne fut changé, elle resta. Pourquoi? "Je ne sais pas, on avait l'habitude avec elle". Par contre le commandant de réserve Jacques Hazan se souvient de son premier séjour en France. C'était dans une colonie de vacances en Bretagne, offerte à des jeunes enfants, arabes comme juifs par sa commune natale de Tiaret. On lui a appris notamment à chanter, et c'était en arabe, les enfants ne faisaient aucune différence entre eux. Difficile pour nous, étrangers à cette vie, de comprendre la complexité de ces relations oscillant entre estime et mépris, amour et haine, complicité et divergences.

Colonie de vacances israélite de Gorze - 2ème Session 1962
Autre témoignage, Mardochée Sebban, il a 32 ans, sa famille vient de Ghardaïa dans le sud Oranais, le M'Zab. Une famille respectée, ayant donné de nombreux rabbins à la communauté, et même un grand rabbin d'Alger, Layani Mardochée. Lui est fonctionnaire, comme beaucoup de juifs qui sont Français, parlent à la fois le français et l'arabe et sont donc des auxiliaires précieux de l'administration. Ghardaïa, c'est le bout du monde, les Juifs y vivaient dans leur quartier, dans un état de grande misère, protégés par les Mozabites mais souvent inquiétés par les Touaregs et les Chambââ. Seules quelques "tribus" juives propriétaires d'immenses palmeraies (les Balouka) font figure de notables. Alors Mardochée Sebban s'est installé plus au Nord, à Aflou. Lors de l'insurrection, il a des ennuis pour avoir dénoncé l'assassin du fils du Président du Consistoire, (un voyou). D'ailleurs membre des unités territoriales, il ne peut être bien vu du FLN En mars, le tueur libéré est nommé commissaire de police ! Il ne reste plus qu'à fuir, escortés par les derniers halt-tracks de l'armée française, et entraînant l'exode de tous les Juifs de la région. Oran d'abord, parce qu'on a un moment espéré un partage de l'Algérie, puis c’est le bateau, et Marseille.

Marseille n'est qu'un lieu de transit où la Croix-Rouge réconforte et restaure les réfugiés. Des membres du Consistoire sont également présents pour repérer les Juifs, leur offrir de la nourriture rituelle, et surtout, pour les empêcher de rester trop longtemps sur place. En effet, lors des exodes précédents, les Juifs égyptiens en 1952, certains Tunisiens ou Marocains en 1955 ont massivement choisi de se fixer dans les régions provençales au parisiennes! Le Consistoire Central s'inquiète d'une telle concentration dans deux ou trois régions, qui mettrait à rude épreuve leurs possibilités d'accueil, et laisserait vides les autres provinces, déchargées ainsi de toute contribution financière et libres de ne témoigner aucun geste de solidarité. Paris a donc attribué à chaque Consistoire, départemental un quota et celui, de la Moselle, relativement faible, est fixé à une trentaine de familles.

A Marseille s’est fondé un petit groupe. Il y a là des familles Aboukrat, Sebban, Bénichou, Bittoun, Sebban, Tordjman, Lévy Eliahou, Lévy-Chapira, Lévy-Marceau. D’autres suivront plus tard les Touitou, Nakache, Maman, Morali, Melle Gaby Partouche, jeune institutrice, etc. La décision de choisir Metz comme lieu de destination s'est parfois faite de façon cocasse. Viviane Lévy raconte que la Croix-Rouge distribuait aux réfugiés des photos des différentes villes de France susceptibles de les accueillir. Son père qui les contemple reconnaît soudain la porte Serpenoise, car il avait fait son service militaire à Metz. Il sait qu'il y a une communauté juive. Il choisit Metz. Mardochée Sebban, un peu plus loin, contemple les mêmes photos. Et à lui aussi, Metz évoque quelque chose : c'est l'adresse des laboratoires Lehning avec lesquels son père, gros commerçant, était en affaires. Pour lui aussi, convaincu en outre de la présence d'une forte communauté, sa destination sera le chef-lieu de la Moselle. Chalom Tordjman, qui avait plusieurs magasins à Oran, est tout aussi perdu, et se joint au groupe, lui aussi parce qu'on l'assure de l'accueil dans une communauté juive pratiquante.

Leurs souhaits seront largement exaucés. Lorsqu'au petit matin, leur train qui a roulé toute la nuit, se range à quai, la Communauté est présente. Il y a là bien sûr les représentants officiels, Henri Lévy, Président, le Grand Rabbin de la Moselle Robert Dreyfus, Paul Lazarus et l'animateur de la jeunesse, Claude Rosenfeld (Cloclo). On habille tous ces démunis qui frissonnent sous notre climat, de vêtements donnés par la SEDIM, sous la houlette de Mme Berthe Horwitz, puis ils seront hébergés d’abord au centre de vacances communautaire de Gorze (pendant un peu plus d’un mois), puis dans un immeuble situé 25, rue de Pont-à-Mousson et mis gracieusement à leur disposition par MM. Roger et Gaston Lévy. D’autres comme Sylvain Binn, prennent en charge des enfants, partout, l’élan de solidarité est manifeste, spontané et profond.

Très vite, le besoin d’une synagogue où se dérouleraient les offices de rite sépharade, se fait sentir. La famille Touitou où le père est rabbin (à la façon d’Afrique du nord), en ouvre une dans son appartement (...). Plus tard, Léon Maman créera un deuxième minyan au Centre Communautaire (...). En 1972, la Communauté engage Léon Elalouf pour l'enseignement et l'animation de la jeunesse, mais qui assume également les fonctions de 'hazan sépharade. C'est l'un deux, Elie Khalfa, directeur de l'Hôtel de Metz, qui crée les buffets du Kiddouch du samedi matin après l'office.

(...) Malgré quelques paroles malheureuses ici ou là, l'incompréhension si vivace des années 1930-1940 entre Lorrains et Polonais a bel et bien disparu et s'est peu manifestée entre aschkénazes et sépharades.

Peu de temps après son arrivée, Viviane Lévy, fut la première rapatriée à se marier en la synagogue communautaire. Elle épousait un jeune juif d'origine polonaise, né à Strasbourg et devenait Madame Tandowski. Une nouvelle génération allait pouvoir éclore avec "un pied sapin et un autre palmier". Elle pourra être aussi fière de l'un que de l'autre.

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