Il y a soixante six ans d'écart entre mon petit frère David et mamie, et ils sont nés dans la même maternité. Pourtant leur histoire, leur destin sont bien différents. Dès 6 ans, mamie Alice entendait parler de la guerre, mais pas une guerre comme j'en connais aujourd'hui, de celles qui se passent au cinéma, ou qu'on simule dans les jeux vidéos, parfaitement irréelles, ou même comme ces guerres lointaines qu'on voit à la télévision, lors des informations. Là, c'est vrai. je peux en remarquer l'horreur, mais un instant seulement. Elle ne me touche pas directement, je n'ai pas peur bien longtemps, je ne tremble pas aux bombardements, je ne crains rien pour mes parents, pour mes amis, pour moi-même. Je vais pouvoir continuer à jouer avec mes copains, continuer à aller à l'école pour m'instruire, continuer à faire du sport. Je ne crains même pas de ne plus avoir à manger. Dans un état de guerre pourrais-je être soigné comme il se doit ?

Cette question m'est venue quand ma mamie m'a raconté l'histoire d'Edmond, son petit frère, qu'on avait mis à l'hôpital pour le guérir d'une grave maladie, cette diphtérie qu'on ne soignait pas bien à l'époque. J'en ai eu froid dans le dos. Je me suis imaginéà sa place, tout petit empli de fièvre et de douleur, tout petit dans un endroit inconnu, tout petit sans ma maman. sans mon papa pour me rassurer, tout petit avec des étrangers, qui m'emmènent je ne sais où, dans la précipitation et l'affolement. Sans doute que j'en aurais fait des cauchemars toute ma vie. Mamie l'a bien senti, ce désespoir d'Edmond, quand elle raconte qu'il a dû réapprendre à vivre avec eux. Quel choc, si petit !

Et ses parents? Ne plus trouver son fils, le chercher dans toute la France en guerre, pendant huit longs mois, sans nouvelles. Quelle angoisse ont-ils vécue ? Si mamie prétend qu'enfant elle a moins souffert que les grandes personnes qui devaient assurer la survie de leur famille, trouver à manger, à se reloger, à travailler, qui se souciaient, aussi, à chaque instant du destin de leurs proches, de leurs amis,elle a eu de grands moments de peur - comme lors des bombardements, de lourds moments d'angoisse - quand ils devaient repartir, s'enfuir. Ce devait être intéressant de voir des soldats français, allemands, anglais et américains, avec leurs différents uniformes ; mais ce n'était plus un jeu, c'était la vraie guerre. avec les bombardements sur les trains, les gares, les centres stratégiques. Ce devait être terrifiant !

Si quand elle raconte son histoire, elle met l'accent sur les moments de bonheur avec sa maman, qui pour une fois prenait le temps de jouer avec elle et de lui raconter des contes de fées, si son exode elle le relate comme une aventure étonnante - marcher la nuit en pleine forêt, dormir dans une étable auprès d'un énorme taureau. manger au restaurant et visiter des châteaux - elle oublie, ou veut oublier combien elle était effrayée par ce monde étrange dans lequel elle vivait, où on l'obligeait à porter un signe infamant. qui la marquait comme "différente", peut- être comme ces insectes nuisibles, les doryphores aux rayures jaunes qu'on la forçait à ramasser.

Dans son récit une chose m'obsède : pourquoi les juifs du camp de Poitiers y retournaient après leur permission ? Comment n'ont-ils pas compris ce qui allait se passer? Faisaient-ils trop confiance à l'humanité ?

Mais que je suis fier de ces juifs français de Poitiers qui accueillaient leurs coreligionnaires étrangers, qui leur donnaient de la nourriture et des vêtements, alors qu'ils n'avaient certainement eux-mêmes pas grand chose pour vivre ! Mais que je suis fier, moi, Mendy, que ma synagogue soit dans la rue du Rabbin Elie Bloch. Chaque jour, je pense à lui en regardant sa plaque dans mon collège. Je le vénère ; je l'appelle même le Grand Rabbin Elie Bloch. car il a soutenu et sauvé d'autres juifs. allant jusqu'au sacrifice de sa propre vie.

Les juifs étrangers, ceux qui avaient fait confiance à leur pays, mais avaient dû partir, ceux qui avaient vu en la France le pays des Droits de l'Homme - ce qu'on nous apprend à l'école - , étaient encore plus en danger que nous, Français. Qu'en est-il, aujourd'hui encore, des étrangers : toujours à se battre pour vivre, pour survivre dans le pays d'accueil, mais toujours les premiers condamnés. les premiers tués dans les guerres... Les oncles et tantes de mamie cachés dans le maquis... Et ses cousins et cousines, comment ont-ils vécu cette guerre ?
S'ils ont été soulagés par l'armistice, cette joie avait un goût amer. Toutes ces familles amies définitivement absentes, quand ils sont eux enfin revenus à Metz. Un vide dans la ville, un grand vide dans le coeur.Comme cette guerre a dûêtre terrible pour eux, pendant, mais aussi après !

J'en suis très ému. II ne faut surtout pas oublier ce que les nazis (les Allemands) ont fait. Les nazis ont tué 6 millions de Juifs, dont des millions de femmes et d'enfants...
Magnat l'Etrange ? J'y pense parfois. Pourquoi l'Etrange ?...

Avant mil neuf cent quarante ils vivaient heureux
Un père, une mère et leurs trois enfants
Leurs rires emplissaient la maison de leurs jeux
Ils vivaient comme toutes les familles de ce temps

Refrain : Que la Shoah ne soit jamais oubliée (bis)

Mais en trente neuf la guerre fut déclarée
Allemands contre Français
Ce fut une guerre sans pitié
Tout homme réquisitionné ou enrôlé

Refrain

C'est ainsi que la famille fut séparée
Le père au front, la famille à la maison
Attendant des nouvelles de leur papa
Dans les cris et la peur d'être arrêtés

Refrain

Un jour un homme frappa à la porte
Après une courte discussion elle fit les bagages
Une valise, un sac, quelques effets

 

Refrain

On les envoya dans un train
Un wagon à bestiaux
Où les arrêts et les départs n'en finissaient pas
Et qui distillaient l'espoir
Au dernier arrêt tout le monde descendit
Les enfants séparés de leurs parents
Partirent en fumée, gazés

Refrain

Les survivants racontent la cruauté des nazis
Ils écrasèrent toute opposition sans pitié --
Ils arrêtèrent Juifs, Tziganes ou opposants
Ils tuèrent, massacrèrent, déchirèrent enfants et bébés

Refrain

Que la Shoah ne soit jamais oubliée (bis)
Que la Shoah ne se reproduise jamais, jamais, jamais...

Shoah
Histoire
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