Meyer Marcel, Unterberger Joseph et Maurice, Weil Frédéric et Jean-Samuel

Rapport 778 du 17.4.1944 du Capitaine, Commandant la Compagnie de Gendarmerie de l’Ain. P.V. 151 du 26.9.44, 200, 201, 203 du 9.11.44, rapport 42/2 du 13.11.44 de la Brigade de Gendarmerie de Marlieux.
Enquête 122 du 13.12.44, 128 du 12.12.44 et 177 du 16.12.44 du Service départemental du mémorial.
Extrait du "Mémorial de l’oppression- Rhône-Alpes, 1945" de Pierre Mazel.

Canton de Villard – MARLIEUX
Le 14 juin, un groupe de miliciens, sous les ordres du commandant d’Agostini, arrête six habitants de la commune. Ils sont enfermés dans une voiture cellulaire où se trouve déjà le maire de Châtillon-sur-Chalaronne. Les prisonniers sont emmenés à la Chapelle-du-Chatelard où les miliciens procèdent à trois nouvelles arrestations.
Quelques minutes plus tard, ils font descendre de la voiture quatre de leurs prisonniers, parmi lesquels se trouve une jeune fille. MM. Venet, Brunard et Perrin sont abattus à coups de fusil, au bord de la route de la Chapelle-du-Chatelard à Sandrans, et Mlle Chabry, dans la propriété de M. Chanet Albert.
Un simulacre de jugement a lieu ensuite à Chatillon. MM. Bourillon, Fromont et Fluttet sont relâchés et reviennent à pied de Chatillon à Marlieux. Le convoi de prisonniers était parti devant eux.

Marcel Meyer
Marcel Meyer

Sur le chemin, au lieu dit "Les Brets", commune de Chatelard, ils découvrent le corps de M. Brunard, abattu de plusieurs coups de feu.
Deux des personnes arrêtées sont déportées.Le 14 juillet 1944, découverte de sept cadavres sur le chemin rural de Curtelet, à 50 mètres de la route nationale.Il s’agissait de cinq israélites et de deux cultivateurs du Jura, arrêtés à Bourg lors de la rafle du 10 juillet et abattus à coups de feu par la police allemande.


Meyer Marcel, 40 ans, israélite, marchand de bestiaux, domicilié à Bourg, cours de Verdun.
Unterberger Joseph, 41 ans, israélite, tailleur, 22, rue du 23ème, à Bourg.
Unterberger, Maurice, 40 ans, israélite, tailleur, 22, rue du 23ème, à Bourg.
Weil, Fritz, 50 ans, comptable, israélite, 7, rue Vaugelas, à Bourg.                                     Weil, Jean-Samuel, 42 ans, israélite, comptable, 7, rue Vaugelas, à Bourg.
Pernaudet, Henri-Joseph, 30 ans, cultivateur à Andelot-le-Saint-Amour.
Paucod, Arthur, 43 ans, cultivateur à Andelot-les-Saint-Amour.

            Le 20 juillet à 17 heures sur le bas-côté de la route nationale 83, on découvre le corps de Jean Adam, 18 ans, atteint de quatre balles de revolver. Ce jeune homme, qui appartenait à un groupe de Résistance, avait été pris par les Allemands les armes à la main, au cours d’un engagement dans la région de Corveissat et amené à Bourg le 17 juillet.

Lettre du Docteur Uhry à la mairie de Colmar
Docteur Pierre UHRY
39 av du Roule
Neuilly/Seine
Tél: maillot 58-78
19.6.1948

Monsieur le Maire,

L’administration de l’Enregistrement me demande de lui fournir une attestation de domicile à Colmar 10A rue Chauffour à la déclaration de guerre et les circonstances de leur départ des membres de ma famille décédés.
- Weil Aline Caroline, née Strauss, expulsée en septembre 1940 par les autorités allemandes (époux Lucien)
- Weil Jean Samuel, mobilisé le 2.9.1939
- Weil Fritz Joseph, mobilisé le 2.9.1939.
ces 2 derniers ayant été démobilisés de zone libre, ne pouvant rentrer à Colmar et fusillés le 14.7.1944 à Marlieux.
Je vous serais obligé...
Veuillez ...

Témoignage Jean-Claude Meyer, Strasbourg, fils de Marcel Meyer.

            Mon père Marcel Meyer est né le 27 février 1904 à Seppois-le-Bas, Haut-Rhin. Marchand de bestiaux, il épouse Lucie-Renée Geismar à Colmar en mars 1935.
Avant la guerre, mes parents s’installent à Héricourt. Mobilisé en 1939, mon père fait la drôle de guerre du côté de la frontière belge. Après la démobilisation, il retourne probablement à Héricourt d’où ses parents sont déportés pour Auschwitz en août 1943.
Réfugiés ensuite à Bourg-en-Bresse, où je suis né le 24 avril 1944, avec ma mère et ma sœur Colette, née en décembre 1935 à Colmar, il a été arrêté le 10 juillet 1944 lors d’une rafle de tous les hommes de 17 à 45 ans, organisée par Klaus Barbie et le préfet vichyste de l’Ain, Joseph Delpeyrou.
Il a été détenu avec 1200 autres hommes dans  la cour de la préfecture, puis dans une caserne de Bourg. D’après des recherches historiques faites par Robert Abécassis, journaliste au "Progrès", des négociations auraient eu lieu entre les autorités allemandes et françaises. La plupart des 1200 détenus ont été libérés, mais mon père avec d’autres Juifs raflés a été conduit en direction de Lyon par la RN83.Monument a la memoire
Au lieudit Curtelet Bois-Rattel, un peu avant le village de Marlieux où il est enterré, il a été fusillé vers 11 heures du matin. Au même endroit et le même jour ont été fusillés au total cinq juifs et deux résistants:
Marcel Meyer, 40 ans
Joseph Unterberger, 41 ans, tailleur
Maurice Unterberger, son frère, tailleur
Fritz Weill, 50 ans, comptable
Jean-Samuel Weill, 42 ans, son frère, comptable
Henri-Joseph Pernaudet, 30 ans, d’Andelot-lès-Saint-Amour, résistant
Arthur Pacaud, 43 ans, d’Andelot-lès-Saint-Amour, résistant.


Le 20 juillet, dans la forêt de Seillon, près de Bourg, le massacre continue: sept Juifs, dont Charles Abécassis, et 3 résistants, sont fusillés:
Léon Blum, 74 ans
Gaston Lévy, 54 ans, ingénieur, gendre de Léon Blum
Jean-Paul Lévy, 20 ans, fils de Gaston Lévy
Charles Abécassis, 55 ans
Isaac Zerbib, 44 ans, forain
Charles Liasser, 54 ans
Charles Schnerb

            Et 3 résistants:
Alexandre Bozonnet, 19 ans
Henri Mairet, 25 ans
Di Almo.

            En mars 1997, j’ai déposé, avec ma mère, auprès du Tribunal de Bourg-en-Bresse, une plainte contre X pour crime contre l’humanité et complicité de crime contre l’humanité.
En mars 1999, la Chambre d’accusation de la Cour d’appel de Lyon notait que les deux responsables du crime étaient Klaus Barbie et Joseph Delpeyrou, préfet de l’Ain, décédés tous deux. Puis elle déclarait recevable la constitution de partie civile vue que "… d’autres responsables à un niveau immédiatement inférieur sont susceptibles d’être identifiés et encore vivants."
Le 2 avril 2002, le Tribunal de Grande instance de Bourg-en-Bresse rendait une ordonnance de non-lieu, non sans reconnaître que:
"… ce lien manifeste entre la confession juive des victimes et leur exécution caractérise le crime contre l’humanité."
Et concluait ainsi:
            "Attendu que l’information n’a pas permis d’identifier les auteurs des faits de crime contre l’humanité
            Attendu, dans ces conditions, qu’il n’existe pas de charges suffisantes contre quiconque d’avoir commis l’infraction visée ci-dessus.
            Par ces motifs
            Déclarons qu’il n’y a pas lieu à suivre en l’état et ordonnons le dépôt du dossier au greffe pour être repris en cas de survenance de charges nouvelles."

Extrait de "Le Pays – Franche Comté"  du 8 avril 1999

Crime contre l’humanité: plainte recevable, par Michel Arnould
Marcel Meyer, originaire de Seppois-le-Bas, avait été exécuté en juillet 1944. La cour d’appel de Lyon estime que les responsables peuvent être identifiés.
La Cour d’appel de Lyon vient de déclarer recevable la plainte pour crime contre l’humanité déposée le 18 mars 1997 au tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse par Lucie Geismar et Jean-Claude Meyer, respectivement veuve et fils de Marcel Meyer.
Ce dernier avait été abattu le 14 juillet 1944, en compagnie de six autres hommes, par un commando aux ordres de Klaus Barbie, alors patron de la Gestapo lyonnaise. Marcel Meyer, marchant de bestiaux, originaire de Seppois-le-Bas, s’était installé dans le département de l’Ain au début de la guerre, avec sa femme Lucie qu’il avait épousée en 1935 à Colmar. En juin 1944, alors que les Alliés venaient de débarquer en Normandie, un accrochage oppose l’armée allemande à un groupe de résistants près de Bourg-en-Bresse. Klaus Barbie, en poste à Lyon, se rend aussitôt dans cette ville qui se trouve être à la fois un foyer de résistance et un haut lieu de la collaboration. Joseph Darnand, chef de la Milice, est originaire de la ville.

1200 hommes raflés
À Bourg-en-Bresse, Klaus Barbie ordonne à la milice de rafler tous les hommes âgés de 17 à 45 ans. 1200 hommes sont ainsi rassemblés le 10 juillet dans la cour de la préfecture. Ceux qui sont trouvés porteurs d’armes ou de munitions sont exécutés sur le champ. Au total 36 hommes seront tués et neuf autres déportés. Klaus Barbie exige, de plus, que la milice et les autorités locales, à savoir le préfet, lui livrent des otages. Ces otages seront finalement au nombre de sept. Deux résistants avérés et cinq civils choisis parce que juifs. Parmi eux, Marcel Meyer dont le fils, Jean-Claude, a alors 3 mois. Quatre jours plus tard, les sept otages sont exécutés à l’aube, probablement par les Allemands, dans un chemin creux le long de la route nationale 83, au lieu-dit Le Curtelet. À la suite de l’arrestation en Amérique latine puis de la condamnation à Lyon, le 4 juillet 1987, de Klaus Barbie, Jean-Claude Meyer, qui s’est installé dans la région strasbourgeoise, et sa mère, aujourd’hui âgée de 89 ans, décident de porter plainte pour crime contre l’humanité afin de tenter de savoir qui a tué leur père et époux et comment il est mort.

Des responsables encore vivants
Une plainte pour crime contre l’humanité est déposée le 18 mars 1997 au tribunal de Bourg-en-Bresse. Deux ans plus tard, le 22 janvier dernier, Melle Nathalie Gouy-Paillier, doyen des juges d’instruction, la déclare irrecevable estimant que: "… compte tenu de l’ancienneté des faits, il n’apparaît pas possible d’ouvrir utilement une information. Toutefois, dans son ordonnance, le juge estime "… incontestable que Monsieur Meyer a été choisi pour être fusillé car juif et que ce fait constitue un crime contre l’humanité tel que défini par le tribunal de Nuremberg et la Cour de cassation française". Néanmoins, le fait que Klaus Barbie ainsi que Joseph Delpeyrou, préfet de l’Ain à l’époque des faits, soient aujourd’hui disparus justifie aux yeux du tribunal de Bourg la décision d’irrecevabilité. La cour d’appel de Lyon, dans sa décision du 19 mars dernier, est d’avis contraire en notant que "d’autres responsables à un niveau immédiatement inférieur sont susceptibles d’être identifiés et encore vivants." L’irrecevabilité est donc cassée et le tribunal de Bourg-en-Bresse prié d’instruire la plainte.

 

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