LE DIMANCHE DU JUDAISME
par Jacqueline CUCHE
Présidente de l'Association Charles-Péguy

Son histoire :

En octobre 1965, lors de la dernière session du concile Vatican II, l'Eglise catholique promulguait la Déclaration conciliaire Nostra Aetate, Son paragraphe 4, consacré aux relations avec le judaïsme, fut pour elle le point de départ d'une véritable conversion : après des siècles d'"enseignement du mépris", elle reconnaissait la profondeur et l'intériorité du "lien spirituel" qui l'unit au peuple de la Première Alliance et posait les bases d'un dialogue qui, depuis, ne cesse de s'approfondir.

Si l'Eglise, en ses plus hauts responsables (catholiques comme protestants d'ailleurs), a multiplié les gestes et les paroles favorisant ces nouvelles relations (et comment ne pas souligner le rôle exceptionnel de Jean-Paul II en ce domaine ?), il faut reconnaître qu'ils sont loin d'avoir atteint l'ensemble des chrétiens.

C'est pour aider ces derniers à progresser dans la connaissance et l'estime de leurs "frères aînés" que l'Eglise leur propose chaque année de célébrer un "Dimanche du judaïsme". Créée en Italie en 1988, cette journée de sensibilisation a été rapidement étendue à plusieurs pays d'Europe, chaque Eglise locale la plaçant au moment qui lui paraissait le plus favorable. En 1992, poussés par l'Amitié judéo-chrétienne de France, les évêques de notre pays choisirent la période des fêtes juives d'automne. De catholique, cette initiative devint œcuménique, et, chaque été, des groupes ou des personnes s'en font le relais pour leur région.

En Alsace, ce fut longtemps le cas de la seule Association Charles-Péguy, du fait de la participation de sa présidente, Jacqueline Cuche, au Service National des Evêques de France pour les Relations avec le judaïsme (ancien Comité Episcopal), mais depuis quelques années les groupes de dialogue judéo-chrétien d'Alsace ont constitué un réseau aux liens de plus en plus étroits et se sont réparti les différents secteurs de la région. Quant aux instances diocésaines de l'Eglise catholique d'Alsace, elles y prennent elles aussi une part de plus en plus grande.

Il ne faut pas se leurrer : le dimanche du judaïsme est encore loin d'être connu et célébré par toutes les paroisses, mais le nombre de celles qui sont contactées croît chaque année, et la multiplication des acteurs "de terrain" est riche de promesses.

Son déroulement :

Durant l'été un matériel spécifique est envoyé aux paroisses : un dossier, élaboré dès les débuts par un groupe de chrétiens d'Ile de France, comprenant des textes de réflexion ainsi qu'un exemplaire d'une carte de vœux et d'une affiche.
Ces dernières – au graphisme original - expriment les souhaits de bonne année que forment les chrétiens à l'adresse de leurs frères juifs. Nombreux sont les paroissiens qui commandent des cartes pour les envoyer ensuite à leurs amis à l'approche du Nouvel An juif.
Les affiches, apposées au fond des églises, attirent l'attention des fidèles sur cette fête liturgique, ou bien, envoyées aux communautés juives et apposées dans les locaux communautaires, elles "réchauffent le cœur" de bien des Juifs, comme le rapportent de fréquents témoignages.
Quant aux textes, destinés à nourrir la réflexion chrétienne et à fournir aux prêtres et pasteurs des pistes pour leurs homélies, ils commentent les lectures liturgiques de ce Dimanche du Judaïsme en visant un double objectif : aider les chrétiens à percevoir l'importance pour eux de cette Parole de Vie qu'est le Premier Testament, et à reconnaître la permanence et la beauté de l'Alliance que Dieu a conclue avec Israël.
Des intentions de prières sont également proposées à l'assemblée dominicale.

Les groupes locaux enrichissent parfois eux-mêmes ce dossier. C'est le cas en Alsace, où, depuis plusieurs années, le pasteur Bernard Keller commente les lectures protestantes du jour, de nombreuses paroisses protestantes prenant, à la différence de leurs sœurs du reste de la France, le cycle de lecture des Eglises luthériennes mondiales. On y trouve aussi depuis peu une présentation des différents groupes ou associations de dialogue judéo-chrétien de la région (*), l'adresse de leur tout nouveau site internet (www.dialogue-jca.org) ou encore d'autres documents qu'ils jugent propres à favoriser le dialogue.

Jointes à ce dossier, différentes propositions sont également suggérées aux paroisses, dans le but de les aider à créer ou élargir des relations avec les communautés juives environnantes ou à susciter une réflexion chrétienne plus approfondie : visite de synagogue, organisation d'une conférence sur un thème juif, création d'un groupe d'étude, invitation d'un intervenant juif à participer à un groupe déjà existant, ou toute autre rencontre qui puisse permettre de créer des liens, d'abattre le mur d'ignorance ou de préjugés qui sépare encore si souvent les juifs et les chrétiens. C'est ainsi que deux paroisses de Strasbourg ont plusieurs fois invité, en ce Dimanche du Judaïsme, un membre de la communauté juive à venir prendre la parole à la fin d'une messe ou d'un culte. Cet acte courageux (il n'est pas évident pour un juif d'entrer dans une église, encore moins de "prêcher" devant une communauté chrétienne…) lui a permis d'établir de profonds liens d'estime sinon avec les paroissiens du moins avec leurs pasteurs.

Sa diffusion :

Outre l'envoi des dossiers aux paroisses ou aux lieux d'Eglise fréquentés par les chrétiens (communautés religieuses, aumôneries, établissements scolaires, etc…), l'envoi d'informations aux médias est aussi un moyen utilisé pour faire connaître le Dimanche du Judaïsme : bulletins paroissiaux et diocésains, journaux d'Eglise ou grands quotidiens régionaux et même nationaux sont ainsi prévenus et invités à répercuter l'événement. Ils le font avec plus ou moins de bonne volonté et plus ou moins d'efficacité, selon l'intérêt qu'ils lui accordent. Comme toujours, connaître la bonne personne au bon endroit peut être un grand avantage !

En 2006 :

Intentionnellement placé entre les fêtes de Rosh-Hashana et Kippour, le Dimanche du Judaïsme 2006 aura lieu le 1er octobre (chaque paroisse ayant bien sûr la liberté de déplacer ce jour si une autre date lui semble meilleure). Alors que des nouvelles terribles nous viennent cet été du Proche Orient, cette journée sera peut-être plus difficile à organiser, mais n'aura jamais été aussi nécessaire. Puissent les prières de nombreux chrétiens monter vers Dieu pour qu'il garde sous sa constante protection son peuple premier aimé !

* À Strasbourg : l'Amitié judéo-chrétienne, l'Association Charles-Péguy, le Groupe d'études bibliques interconfessionnel, les Sœurs de N.D. de Sion et "Etude du Judaïsme"
À Colmar : "Juifs et chrétiens pour se mieux connaître"
À Mulhouse : l'Amitié judéo-chrétienne et l'association Bible et Culture
A Blotzheim (près de Saint-Louis) : le groupe Menora
Et deux instances régionales d'Eglise : la Commission diocésaine pour les relations avec le judaïsme (catholique) et la toute jeune Commission protestante de dialogue avec le judaïsme.


Relations judéo-chrétiennes
 
         

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