Mon lexique judeo-alsacien


LA SCHULE - LA SYNAGOGUE

3.    LE CULTE

Arche Sainte de la synagogue de Bouxwiller
Synagogue de Bouxwiller
Dans le cadre de l’office, la lecture de la Tora occupe une place de choix et chaque étape de cette lecture est désignée par un terme approprié.

D’abord on ouvre le ORON HA-KODECH, l’Arche sainte (oron : hébr. = armoire ; kodech : hebr. = lié à la sainteté).

La personne qui a l’honneur d’ouvrir le ORON HA-KODECH et de Ussheve (ou Ausheben), c’està dire sortir le rouleau de la Loi du tabernacle, le remet dans l’ArcheSainte après la lecture de la Parche (hébr. : paracha = péricope hebdomadaire, section du Pentateuquequi donne lieu à la lecture rituelle du Shabbath ; il s’agit de Einheben(ou Inheve).

In der Oren Legen, "mettre dans le oren " , a une toute autre signification, puisqu’il s’agit de mettre un mort en bière, le mot hébreu oren désignant toutes sortes d’armoires ou de contenants - en l’occurrence il s’agit d’un cercueil.

Cette fonction honorifique qui consiste à sortir le Sefer Tora et à le remettre en place, est désignée en hébreu par les termes hotzaa ve-hakhnassa ="sortie et rentrée".

La déformation de la prononciation de cette formule a abouti à l’expression Sim’henosso. Or les sonorités de la première partie de ce terme évoquent irrésistiblement, par association d’idées, avec la notion de Simh’o ( = joie). Le résultat de ce rapprochement a été, dans les communautés alsaciennes, qu’on évitait de donner à un endeuillé cet honneur, comme si ces fonctions désignées par un terme qui rappelle approximativement la joie, étaient incompatibles avec le deuil.

Pendant que l’officiant lit la Tora, le Segen (de l’hébreu segan = "remplaçant") se tient à ses côtés pour vérifier que la lecture est correcte et pour lui indiquer le tropp (signes de la cantilation traditionnelle).

Si, bien souvent, le mot de trop a été oublié dans les familles alsaciennes, il vient de connaître une nouvelle jeunesse grâce à Haïm Potok dont le dernier ouvrage paru dans la collection "Livre de Poche", intitulé Le maître du trop, narre avec toute la sensibilité de l’auteur, l’histoire d’un professeur qui enseignait aux enfants la lecture de la Loi.

Daïter
Daiter
Le lecteur de la Tora se sert d’un Daïter sorte de stylet – souvent en argent parfois en bois – se terminant par une pointe revêtant la forme d’une main miniature et servant à suivre la lecture de la Tora, ligne par ligne et mot par mot . Le mot Daïter est dérivé du mot allemand deuten qui veut dire, entre autre, monter, désigner ; compte tenu de la forme de cet objet on le désigne aussi par le terme hébreu Yad (= main).

Les sept personnes appelées à la Tora récitent une bénédiction avant et après le passage biblique qu’on lit pour elles.


BIRKATH HA-GOMEL

Il peut arriver que quelqu’un veuille en plus " Gomel benchen", (réciter Birkath ha-Gomel, c’est à dire remercier Dieu, par uneformule consacrée, pour avoir échappé à un grave danger.

Et "Kolle Kaal" ( = toute la communauté) de répondre : "que Celui qui t’a protégé cette fois, continue à te protéger chaque fois que tu en auras besoin".

L’origine de cet usage est à chercher dans la Genèse (29:35), où Léa donne encore naissance à un fils, ce qui lui fait dire : "Cette fois, je veux remercier Dieu (ODE ), c’est pourquoi elle l’a appelé "yeOUDa". Et elle cessa d’enfanter".
La lecture attentive de ce verset peut nous laisser l’impression que le verbe "remercier" peut avoir dans ce contexte l’un des sens qu’il a pris en français, c’est à dire "congédier": tout se passe donc comme si, en "remerciant Dieu", on Lui disait – à Dieu ne plaise ! – qu’on Le congédie et qu’on n’a plus besoin de Lui.
C’est pour conjurer le risque d’une telle interprétation que toute la communauté s’écrie à l’attention de celui qui a dit Birkath Hagomel : "que Celui qui t’a protégé cette fois, continue à te protéger chaque fois que tu en auras besoin".

Lorsqu’on entendait quelqu’un réciter Birkath Hagomel alors que personne ne savait à quel grand danger il avait échappé, tous les fidèles s’interrogeaient sur la raison de cette bénédiction d’action de grâce ; et il se trouvait toujours quelqu’un pour donner l’explication :
- C’est parce qu’hier sa femme a lavé sa chemise….
-  ? ? ? ?
- Oui ! Sa femme a lavé sa chemise hier et l’a suspendue sur le balcon ; un coup de vent a emporté cette chemise qui est aussi tombée du deuxième étage. Imaginez la catastrophe s’il avait été dedans… ! ! ! ! !"


Après la fin de la lecture de la Tora l’un des fidèles est honoré par la fonction de Hagbe (hébreu Hagbaha = "élévation"), tandis qu’un autre enroule le Sefer Tora, Guelile , avec une Mappe (voir s.v. Mappa).

Les Shabath et jours de fêtes donnent lieu à la lecture de Haftore (hébreu : Haftara), un texte biblique tiré des prophètes.


SCHUL-GANG

La vie de la communauté était réglée au rythme des services religieux  Schul-Gang (littéralement : l'aller à la synagogue ; par extension  un office religieux.
L'heure du début de l’office, Schulzeit, était généralement scrupuleusement respectée (par extension, shulzeit désigne l’office, sans référence à l'horaire).
Il est évident que personne ne voulait arriver en retard aux offices, c’est la raison pour laquelle la communauté se dotait d’un Schul-Klopfer qui venait, surtout pendant la période des selikhoss, frapper aux portes des fidèles pour les réveiller de bonne heure afin qu’ils puissent arriver à l’heure à l’office du matin.

Pendant les offices, chacune avait à coeur de Ore ( = prier ; du latin Orare  qui veut dire prier).
L'autre terme qui se traduit par réciter une bénédiction, Benschen, est aussi àmettre en relation avec une racine latine de laquelle dérive le mot  benecite !


DUKHENE

Durant les jours de fête, au cours de l’office de Moussaf, les cohanim prononcent les bénédictions sacerdotales, sur l’estrade devant l’Arche Sainte. Le terme hébraïque qui désigne cette estrade a donné, par extension, le verbe germanisé Dukhene = "donner la bénédiction sacerdotale".

Si les fidèles se mettaient à trop   Schmusse  (= bavarder), on ne manquait pas de leur rappeler la sainteté du lieu qui invite au respect ; la Schule est le lieu où, plus que n’importe où ailleurs, il faut éviter de dire des "Dvorim beteilim", "des paroles insignifiantes". Selon le sujet de conversation, on pouvait même parler de "Dvorim betelim in leere Kelim " = "Paroles insignifiantes dans des vases vides".


Daïter : Main indicatrice pour la lecture de la Tora ; 18ème siècle ; Bois. Coll. Société d'Histoire des Israélites d'Alsace et de Lorraine, Strasbourg. Retour au texte


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