Mon lexique judeo-alsacien
BERCEUSES


A. Lévy : Grand-parents avec petit-fils
coll. M. et M. Warschawski
Je me souviens avec émotion d’une chanson naïve que me chantait ma Maman pour m’endormir, si je ne voulais pas fermer les yeux quand le "marchand de sable" était déjà passé. J’imagine n’être pas seul à me souvenir de cette berceuse que l’on pouvait entendre jadis, au crépuscule, dans la "Yéddegass", la rue des Juifs.

(Je n’aurais sans doute pas osé la faire figurer ici, si je n’en avais retrouvé le texte dans les Traditions Populaires Alsaciennes de Honel Meiss.)

Schlof, Bobele schlof,
Dein Pappe het die Schof
Dein Mamme het die Lämerlich
Schlof, Bobele schlof.
Dors, mon petit bébé, dors
Ton papa garde les moutons,
Ta maman garde les petits agneaux
Dors, petit bébé, dors.

BOBELE = “petit bébé”, “petite poupée”. (La terminaison "...le" – comme la terminaison "...lein" en allemand – traduit un diminutif, souvent affectueux. Exemples : "Kâtzele" = " petit chat" (Katz = chat) ; "Missele = "petite souris" (Maus = souris).

Autre berceuse :

Aïa Bobala, was rappelt im Strau :
S’ Kätzele ech gepeïert, S’ Maïssela ech frau.
Ecoute, mon bébé chéri, ce qui fait du bruit dans la paille :
Le petit chat est mort, la petite souris est contente.

Encore une :

Ich well der eps ertzäle
Von der alte Beïle :
Wenn se kä Grumpere hett,
Kenn se käne schäle.
Je veux te raconter quelque chose
De la vieille Bella :
Si elle n’a pas de pommes de terre,
Elle ne peut pas en éplucher.

Sans doute les textes de ces berceuses ont-ils contribué à former l’esprit des petits enfants juifs au bon sens simple et naturel qui contribue à leur charme.

Ce bon sens se retrouve dans de nombreux dictons populaires qui n’ont souvent rien de spécifiquement juif, sinon un mot en judéo-alsacien ou en hébreu :

S'Butter-Brot fallt emmer ouf's Ponem.
" La tartine tombe toujours sur le côté beurré" :
Quand la malchance vous poursuit, tout concourt à votre perte

Ou encore :

Die Katz fallt emmer ouf d'Fiss.
"Le chat tombe toujours sur ses pattes"
Il y a des mentalités que, malgré tous les efforts, on ne change jamais complètement. : " Chassez le naturel il revient au galop".

De quelqu’un dont on ne comprend pas (ou de qui on n’admet pas) qu’il se comporte comme un gosse ou qu’il tienne des propos infantiles, on dira :
S’ess yo kebobela meï. "Ce n’est pourtant plus un bébé !"


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